Rivista di Scienza - Vol. II/La parthénogenèse expérimentale et les propriétés des solutions électrolytiques
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LA PARTHÉNOGÉNÈSE EXPÉRIMENTALE ET LES PROPRIÉTÉS DES SOLUTIONS ÉLECTROLYTIQUES.
Le fait brutal qui sert de base à la question de la parthénogénèse expérimentale est celui-ci: Certains œufs, tenus éloignés des spermatozoïdes et incapables de se développer par eux-mêmes dans les conditions ordinaires, se développent cependant si on les soumet à certaines conditions experimentales.
Si l’on fait abstraction de quelques expériences où un commencement de développement a été obtenu par des actions mécaniques (friction, secouage) ou physiques (chaleur), on peut dire que tous les agents parthénogénisants sont des solutions de substances chimiques, le plus souvent salines, substituées ou ajoutées à l’eau douce ou marine qui est le milieu naturel des œufs soumis à l’expérience.
Ces solutions font donc l’office du spermatozoïde, d’où le nom de fécondation chimique donné au phénomène.
Ce terme ambitieux n’est pas justifié.
Un cheval attelé à une lourde charrette arrive épuisé en face d’une côte et s’arrête, ne pouvant la monter. Vous le dételez, lui donnez à manger et à boire, le laissez se reposer, puis vous le réattelez et il monte la côte. Au lieu de cela, vous le cinglez de coups de fouet, et il la monte aussi. Dans le premier cas, il l’a montée parce qu’il a eu du repos et de la nourriture. Direz-vous que les coups de fouet l’ont reposé et nourri?
Le même résultat à été obtenu par des moyens différents. Il peut en être de même ici. Les solutions chimiques font développer l’œuf; cela ne prouve pas qu’elles le fécondent.
Nous appellerons donc ce phénomène, non une fécondation artificielle, mais une parthénogenèse expérimentale, c’est-à-dire déterminée par des conditions introduites par l’homme.
Dans le problème de la parthénogénèse expérimentale, deux questions sont à envisager: I. Quel est le résultat obtenu; II. Quel est le mode d’action des agents employés.
La première ne comprend que des questions de fait qui peuvent être exposées d’une façon très sommaire parce qu’elles ne comportent aucune ambiguité; il n’en est pas de même de la seconde où l’interprétation a une part prépondérante et qui nécessite de longs développements.
I. Résultats obtenus.
Ici encore, il y a avantage à subdiviser la question méthodiquement. Nous examinerons: 1º Chez quels animaux ou végétaux la parthénogénèse expérimentale a été obtenue; 2° A quel stade leur développement est parvenu; 3° Quels ont été les caractères particuliers de ce développement; 4° Quels agents ont déterminé la parthénogénèse.
1° - Etres chez lesquels la parthénogénèse a été obtenue expérimentalement. — Le plus simple est d’en donner la liste en suivant l’ordre taxonomique.
Végétaux - Algues (Hydrodyction, Protosiphon, Basidiobolus, Spirogyra).
Protozoaires - La question ne se pose pas pour ces êtres, vu l’absence chez eux d’une fécondation vraie par œufs et spermatozoïdes. Peut-être pourrait-on, cependant, rapprocher de la parthénogénèse expérimentale les expériences où Calkins, en 1902, a réussi à retarder la sénescence des Infusoires au moyen d’une nourriture approprié (extrait de viande) ou même par de simples agents physiques (chaleur) ou mécaniques (agitation).
Cœlentérés - Rien.
Echinodermes - Oursins (Arbacia, Paracentrotus [Strongylocentrotus], Echinus, Sphærechinus).
Vers - Annélides polychètes tubicoles (Chœtopterus Amphitrite).
Vermidiens - Géphyriens (Phascolosoma, Thalassema).
Mollusques - Lamellibranches (Mactra).
Insectes - Diptères: Ver à soie (Sericaria).
Poissons - Cyclostomes (Petromyzon); Téléostéens, Gardon (Leueiscus), Fundulus.
Amphibiens - Anoures, Grenouille (Rana).
Vértébrés supérieurs - Rien.
Il est à croire que beaucoup d’autres êtres seraient susceptibles de subir la parthénogénèse expérimentale, car beaucoup n’ont pas été examinés sous ce rapport et tous ceux qui sont hermaphrodites ont été laissés de côté comme se prêtant mal à des expériences rigoureuses.
2° - Stade auquel est parvenu le développement. — Phanérogames, Thalictrum. - Le développement aurait continué jusqu’à la graine fertile. Mais ce beau résultat semble très contestable. En 1902, Overton l’aurait obtenu en arrosant les pieds de cette plante avec certaines solutions salines. Mais on a des exemples de parthénogénèse naturelle compléte chez d’autres Phanérogames. Day, en 1896, l’a observée chez le Thalictrum même; en sorte que l’intervention expérimentale peut fort bien n’ètre pas la cause du résultat.
Algues. - Il s’agit ici d’un phénomène très particulier. Chez Spirogyra, Klebs, en 1896, faisant agir sur des cellules en voie de copulation une solution de saccharose, a vu la copulation s’interrompre et les cellules donner chacune une parthénospore.
En somme, chez les Végétaux, les phénomènes rapportés à la parthénogénèse expérimentale sont trop différents de ceux observés chez les animaux pour qu’on soit autorisé à les assimiler à ces derniers. Nous les laisserons donc de côté dans ce qui va suivre.
Vertébrés. - Rana, jusqu’au stade blastula (Dewitz, au moyen du bichlorure de mercure; Bataillon, par des solutions de saccharose et de chlorure de sodium; Mme Rondeau-Luzeau, idem).
Leuciscus, même stade (Mme Rondeau-Luzeau, même procédé).
Fundulus, stade à deux blastomères (Loeb).
Petromyzon, même stade (Bataillon, même procédé).
En somme, chez les Vertébrés, on n’a pas dépassé une segmentation plus ou moins avancée et rien n’autorise à affirmer qu’il serait possible d’atteindre la fin du développement.
Insectes - Sericaria. Les œufs non fécondés du papillon du ver à soie se développent parfois spontanèment en chenilles parfaites. Aussi est-il difficile de dire dans quelle mesure l’intervention experimentale a contribué à ce développement. Cette intervention, faite par Tichomirov, en 1886, consistait à brosser les œufs ou à les immerger quelque temps dans de l’eau additionnée d’acide sulfurique.
Mollusques - Mactra, jusqu’au stade à 16 blastomères (Kostanecki, au moyen de KCl, de CaCl2 et d’eau de mer concentrée).
Vermidiens - Phascolosoma, jusqu’au stade à 30-60 blastomères (Loeb au moyen de KCl).
Vers - Chœtopterus, jusqu’à la larve trochophore nageante, mais ne survivant pas au delà de 2 jours (Loeb, au moyen de KCl).
Echinodermes - Ce sont eux qui ont donné les résultats les plus remarquables. Ces résultats ont été obtenus par la strychnine, la chaleur, le secouage, mais surtout par l’acide carbonique pour les Astéries, et par les solutions hypertoniques additionnées de substances adjuvantes diverses pour les Oursins. Chez ces derniers, Loeb a obtenu des Pluteus, qui d’ailleurs ne survivaient pas. Y. Delage a obtenu chez les Asterias, au moyen de CO2 un pourcentage de réussites tel que le nombre des œufs non segmentés était insignifiant et moindre que dans les fécondations artificielles par le sperme: pratiquement, c’était le 100%. Les larves ont donné des Bipinnaria et des Brachiolaria, absolument normales, dont quelques unes ont vécu jusqu’à 4 mois et ont atteint le stade de la métamorphose, caractérisé par la formation du disque apical avec ses spicules et l’indication de la forme pentagonale et par l’appareil aquifère. Chez les Oursins, Paracentrotus (Strongylocentrotus), il a obtenu, au moyen d’une solution hypertonique banale, alcalinisée par du sulfite de soude et additionnée d’une quantité minime de chlorure de Nickel, des Pluteus qui ont aussi vécu plusieurs mois et dont quelques uns ont atteint le stade de la métamorphose, montrant le disque apical, les tentacules terminaux et même les premiers pédicellaires. Mais le pourcentage des réussites reste toujours très inférieur à celui des Astéries1.
3° - Mode de dévéloppement. — Il fondrait un long article pour exposer complétement ce sujet. Mais, comme ce n’est pas en lui que réside l’intérêt de la question, je le résumerai rapidement. Il a été étudié surtout par Morgan, Wilson et par Y. Delage, et presque exclusivement chez les Echinodermes.
Après l’action des réactifs appropriés, et généralement, lorsque l’œuf a été replacé dans son élément naturel, apparaissent dans le cytoplasma de nombreux asters qui se partagent les chromosomes mais qui, bientôt, s’effacent; c’est un aster unique situé près du noyau qui détermine la division de celui-ci. Le cytoplasme se divise, non par un sillon circulaire, mais par une encoche qui s’approfondit progressivement. Les segmentations, d’abord plus ou moins anormales, se régularisent de telle sorte que, dans les cas favorables, à la fin de la segmentation, il n’y a pas de différence appréciable avec un embryon normal.
Fréquemment l’œuf se divise en fragments très inégaux, dont les plus petits, tout au moins, paraissent ne pas être nucléés; cette fragmentation aboutit à une résolution en sphérules très petites (dégénérescence vésiculaire), qui finalement se désagrègent.
Même dans des larves assez parfaites pour éclore et se mouvoir, il existe très souvent un résidu de segmentation sous la forme d’un fin précipité noirâtre, dans la cavité blastulienne ou sous la membrane vitelline. Ces larves périssent toujours au bout de peu de temps.
D’après Treadwell, chez Podarke, la larve prototroche serait une différenciation directe de l’œuf sans multiplication cellulaire. Ce fait aurait une portée considérables par ses conséquences relativement à la signification de la pluricellularité des Métazoaires. Y. Delage avait eu, antérieurement, la même idée en ce qui concerne les larves mérogoniques de Lanice. En tout cas, il n’est pas général chez les Annélides, car Bullot a constaté chez une autre Polychète, Ophelia, une segmentation normale.
Loeb s’est donné beaucoup de peine pour faire apparaître une membrane vitelline avant la segmentation, comme dans la fécondation normale. Il y a réussi par des applications très courtes d’acides organiques (butyrique, valérianique). J’ai pu répéter ses expériences, mais je n’ai pu obtenir la membrane que rarement, et les œufs n’ont jamais évolué. Il ne semble pas que le résultat final ait beaucoup dépassé, même entre les mains de Loeb, celui que donnent les procédés ordinaires. D’autre part, une membrane se forme parfaitement sans l’emploi de ces précautions qui semblent constituer une complication superflue.
4° - Agents de la parthénogénèse. — Ils ont été indiqués sans ordre dans le précédent paragraphe à propos des animaux dont ils ont déterminé le développement. Je les grouperai ici par catégories.
Physico-chimiques. - Certaines substances, strychnine, sérum antidiphtérique, benzol, ont donné quelques résultats. Il en est de même de l’eau de mer concentrée. Il faut y ajouter CO2, réactif de choix pour les Astéries. Mais pour tous les autres animaux, le réactif universel consiste en solutions électrolytiques, salines ou acides parfois basiques, ajoutées à l’eau de mer, hypertoniques par rapport à celle-ci2, et additionnées ou non de substances adjuvantes diverses qui agissent soit en augmentant la pression osmotique (sucre, gélatine), soit par une action dite spécifique et de nature encore inconnue.
II. Mode d’action des agents.
Ainsi que nous venons de le voir, parmi les agents de la parthénogénèse, une catégorie l’emporte de beaucoup sur toutes les autres par son importance, ce sont les solutions salines. La connaissance des propriétés de ces solutions est donc indispensable à l’étude de la question.
Les propriétés des solutions constituent un des chapitres les plus importants de la Physico-chimie. C’est ce chapitre que je dois résumer ici en quelques pages. N’étant ni chimiste ni physicien je n’ai point l’autorité nécessaire pour traiter la question de haut. J’adresse ici mes remerciments a Mr Perrin qui a bien voulu me prêter le concours de sa critique éclairée. Aux physiciens, cet exposé paraîtra, à bon droit, incomplet et imparfait sur bien des points; mais peut être l’exposé magistral fait par quelqu’un de mieux qualifié eut-il paru trop savant et trop ardu aux biologistes auxquels cet article s’adresse. C’est là mon excuse de l’avoir écrit.
PROPRIÉTÉS DES SOLUTIONS.
Abstraction faite des propriétés optiques, qui ne nous intéressent pas ici, les propriétés des solutions semblent résulter d’abord d’une attraction entre la substance dissoute et l’eau, puis d’une influence spéciale de l’eau sur le corps dissout.
L’attraction produit 4 effets principaux:
L’action spéciale, qui ne s’exerce que sur certaines catégories de substances, consiste dans l’ionisation qui:
A. Substances non ionisables.
Commençons par les substances où les premiers effets seuls se produisent: ce sont des substances organiques sans fonction acide ou basique bien marquée, telles que les sucres, la dextrine, l’alcool, Purée, l’asparagine, le glycocolle, etc. etc. Nous prendrons la solution de sucre comme exemple typique.
1° - Dépression de la tension de vapeur. Tonométrie. — A toute température, l’eau émet des vapeurs dont on peut mesurer la tension au moyen d’un manomètre approprié. A chaque degré de température correspond une tension donnée, fixe. Il en est de même pour la solution de sucre, pour une même température; mais, la tension est toujours moindre que pour l’eau pure: il y a donc dépression de la tension de vapeur. Il semble que cette attraction que nous avons supposée entre l’eau et la substance dissoute se traduise par une rétention, comme s’il y avait une résistance supplémentaire à vaincre pour séparer l’eau du sucre, en sorte que, pour effectuer la même séparation, il faille une température plus élevée.
concentration, c’est-a-dire le nombre de grammes de la substance par litre de solution, on a: : c’est la Loi de Wülner.
Il semble, au premier abord, n’y avoir aucune relation simple entre les des diverses substances.
Raoult en a trouvé une très remarquable: Si l’on prend pour unité de poids de chaque substance son poids moléculaire, les valeurs de deviennent égales pour toutes les substances à concentration égale. Les concentrations ainsi mesurées se nomment concentrations moléculaires.
On sait que les poids moléculaires s’obtiennent en faisant la somme des poids des atomes constituant la molécule. Ainsi, on a:
Pour | le saccharose | C12H22O11 | 342 | |
» | le glucose | C6H12O6 | 180 | |
» | la mannite | C6H14O6 | 182 | |
» | l’urée | CO(AzH2)2 | 60. |
Ces poids moléculaires sont les poids des molécules exprimés en une unité de poids extrêmement faible et inconnue; et, quand on les exprime en grammes, on peut dire qu’ils sont un certain multiple très grand et inconnu du poids vrai de la molécule. On peut donc, sous cette réserve, considérer les poids moléculaires exprimés en grammes comme représentant le poids de une molécule et dire que la molécule de sucre pèse 342 gr., celle de glucose 180 gr., celle d’urée 60 gr. Pour introduire cette réserve dans le vocable, on dit alors la molécule-gramme. On voit aussi par quelle extension de ce légitime abus de langage on peut dire qu’une solution d’urée contenant 30 gr. ou 20 gr. de cette substance contient molécule ou de molécule. Exprimés en unités de poids moléculaire, les poids des diverses substances dénombrent leurs molécules. On est convenu d’appeler solution normale celle qui contient une molécule par litre de solution; les expressions bi-normale, déci-normale, centi-normale se comprennent d’elles mêmes; on les écrit: , , et l’on peut exprimer toutes les variations de la concentration au moyen d’un rapport convenable: , etc. Les solutions contenant par litre un même nombre de molécule sont dites équimoléculaires.
La loi de Raoult indique que les solutions équimoléculaires produisent, à une même température, une dépression, , égale quelle que soit la substance dissoute; et, quelle que soit la température, le rapport est le même pour toutes. Plus généralement, on peut dire que le rapport est proportionnel à la concentration moléculaire et, écrire, étant un nombre constant:
Raoult a déterminé la valeur de la constante en montrant que, si l’on appelle le nombre de molécules-grammes dissoutes et le nombre de molécules-grammes du solvant, ici l’eau, on a:
d’où
Dans las solutions diluées, l’eau formant la presque totalité de la solution, on peut admettre que son poids est 1000 gr., son pòids moléculaire étant 18, et .
Le nombre fourni par l’expérience et par une autre théorie est peu différent: 0,0185. Naturellement, ce nombre varie avec la nature du solvant; mais, dans tout cet article nous laisserons de côté tous les solvants autres que l’eau, parce qu’ils n’ont qu’un intérêt insignifiant en biologie.
En résumé, la formule générale est:
étant exprimé en degrés et en molécules-grammes.
2° - Elévation du point d’ébullition. Ebullioscopie. — L’ébullition n’est qu’un cas particulier de l’évaporation. A 100°, l’eau bout parce que . mais la solution ne bout pas encore parce que . Pour arriver à , il faut élever la température d’un certain nombre de degrés au dessus de 100°.
est proportionnel à . Van-t-Hoff a établi, en outre, par les lois de la thermodynamique, qu’il est proportionnel au carré de la température absolue d’ébullition du solvant pur et inversement proportionnel à la chaleur latente de vaporisation du même solvant. On a donc . Ici, , . Le coefficient est égal à , étant la constante des gaz, égale ici, avec les unités adoptées à 2 (en réalité un peu moins, mais la différence est négligeable), le nombre de molécules du solvant et le poids moléculaire de ce dernier. Le produit est donc le poids du solvant, ici 1000 gr., en sorte que . La formule dans ce cas devient donc:
étant exprimé en degrés et en molécules-grammes. , comme , est donc uniquement dépendant de et lui est proportionnel.
3° - Abaissement du point de congélation. Cryoscopie. — Cette attraction entre les molécules dissoutes et l’eau, qui retarde l’évaporation et l’ébullition, fait que l’eau est encore retenue par les molécules, à la température où elle devrait s’en séparer pour se congeler. L’eau gèle à 0°; la solution gèle à une température inférieure à 0° d’un certain nombre de degrés .
Nous retrouvons ici les mêmes lois que pour la tonométrie. , pour une même substance, varie avec les diverses substances (loi de Blagden); mais si à , concentration en grammes on substitue la concentration moléculaire , on a , étant indépendant de la nature du corp dissout.
Par les lois de la thermodynamique, Van-t-Hoff a établi la formule générale qui nous permet de calculer le coefficient ci dessus: , dans l’expression duquel on retrouve le même facteur que pour le calcul de (voir p. 64), et, en plus température absolue de congélation du solvant ici 273°, et chaleur latente de fusion du même, ici 79 calories.
On a donc:
étant exprimé en molécules grammes par litre, se trouve exprimé en degrés.
4° - Pression osmotique. Osmose. — Cette attraction entre l’eau et les molécules dissoutes s’est traduite jusqu’ici par une rétention de l’eau. Elle va maintenant se manifester par un déplacement de l’eau libre du voisinage vers la solution. Si mince que soit une cloison imperméable, elle ne laisse pas cette attraction se manifester. Il faut pour cela le contact: si le contact entre la solution et l’eau pure est immédiat, il y a mélange par diffusion; s’il a lieu par l’intermédiaire d’une membrane poreuse, qui se laisse mouiller, l’eau traverse la membrane et est capable de vaincre une certaine résistance pour pénétrer dans la solution. Cette membrane peut être d’origine organique (vessie, intestin, parchemin) ou inorganique (précipité de ferro-cyanure de cuivre dans les mailles d’un vase de terre poreuse). Deux vases contenant l’un de l’eau pure, l’autre la solution, séparées par une membrane poreuse constituent un osmomètre. Dans l’osmomètre, le niveau monte dans le vase contenant la solution et la difference de niveau représente la résistance vaincue par la force osmotique.
Mais cette différence de niveau ne mesure pas la valeur initiale de la force osmotique, car la solution, en absorbant de l’eau, se dilue, et nous verrons que la force osmotique diminue avec la concentration.
Pour mesurer la force osmotique, on peut presser avec un piston ou d’autre manière, sur la surface libre de la solution. On voit alors que, quand on comprime, de l’eau repasse de la solution dans le vase à eau pure, et quand on décomprime, de l’eau pure repasse dans la solution. A chaque instant la charge du piston mesure la force osmotique de la solution au degré de concentration ou elle est à ce moment. Pour avoir la force osmotique initiale de la solution, il faut faire ressortir toute l’eau qui y était entrée. La force osmotique faisant équilibre à une pression vraie peut être considérée elle même comme une pression, de sens contraire, d’où le nom qui lui a été donné de pression osmotique que l’on figure par le simbole .
Les lois régissant la valeur de sont parallèle à celles de , de et de . est proportionnel, pour une même substance à la concentration en poids c de la solution; quelle que soit la substance, il est proportionnel à la concentration moléculaire ; il est, enfin, proportionnel à la température absolue .
Corollaire: A même température, toutes les solutions équimoléculaires ont le même et sont dites isotoniques; le plus concentrées sont dites hypertoniques par rapport aux moins concentreés dites hypotoniques. Ces termes n’ont jamais qu’une valeur comparative. Dans l’osmomètre, une solution hypotonique cède de l’eau à une hypertonique jusqu’à ce que les deux solutions soient isotoniques.La pression osmotique n’a pas une valeur faible. Elle n’est pas de quelques grammes comme , et étaient de quelques dixièmes de degré. Elle est considérable: pour la solution normale, elle dépasse 22 atmosphères (22,35 à 0°) et serait par conséquent capable de soutenir une colonne d’eau de 230 mètres!
Van-t-Hoff a remarqué qu’elle est précisément égale à la pression de vapeur du corps dissout. Si l’on réduit en vapeur une molécule d’alcool, cette vapeur occupe, à la pression ordinaire, litres 22,35 et, si on pouvait, sans la condenser, la comprimer jusqu’à la réduire à 1 litre, elle acquerrait, d’après la loi de Mariotte, atm. 22,35. De même pour les corps non volatils, sucre, urée. Le calcul montre que, à la pression ordinaire, une molécule fournirait litres de vapeur 22,35, qui réduits à 1 litre donnerait encore la même pression de atm. 22,35. D’une façon générale, quel que soit le poids de substance dissoute dans un volume quelconque de solution, sa pression osmotique a la même valeur que la pression qu’aurait, ramenée au même volume, la vapeur produite par la vaporisation du même poids de ce corps à la même température. Les variations de pression dépendant des variations de température sont aussi les mêmes, proportionnelles dans les deux cas à .
Van-t-Hoff a été conduit par cette remarque à penser que le corps dissout était dans l’eau a l’état gazeux.
Il résulte de ce qui précède, ainsi que des lois énoncées plus haut, que la formule générale de la pression osmotique est identique à celle, qui régit la pression des gaz. On a: on est la température absolue et est la constante déjà déterminée pour les gaz en kilogrammes-mètres et 0,0821 en atmosphères, et le volume en litres du gaz ou de la solution.
Pour donner à cette formule une forme comparable à celle des précédentes, remarquons que . En effet, litres est, dans la formule, le volume contenant 1 molécule; si donc litre contiennent 1 molécule, 1 litre contiendra molécules; or est, par définition, le nombre de molécules contenu dans 1 litre.
La formule devient alors: , étant évalué en atmosphères et en nombre de molécules contenu dans un litre de solution. On remarquera que, dans les conditions physiologiques les plus extrêmes, ne varie guère que de 0 a +40°, et de 273 à 313, ce qui fait seulement environ.
De même que la pression des gaz est produite par les mouvements des molécules gazeuses heurtant la paroi du récipient, de même, d’après Van-t-Hoff, la pression osmotique serait produite par le mouvement des molécules de la substance dissoute.
L’existence de ce mouvement semble avoir sa démonstration objective dans l’existence du mouvement brownien. Les chocs des molécules étant individuellement très faibles et de direction quelconque ne peuvent mouvoir un solide un peu gros suspendu dans le liquide, parce que le corps à mouvoir a une grande inertie et que les chocs étant extrêmement nombreux sont presque tous annulés par des chocs de direction opposée, en sorte que leur résultante est faible. Mais si la particule est très petite, son inertie est faible, les chocs qu’elle reçoit étant peu nombreux à chaque instant, leur résultante est, proportionnellement, moins négligeable et suffit à déplacer la particule. C’est ce qui arrive dans le mouvement brownien. Il en est de même pour les bulles gazeuses incluses dans les liquides enfermés dans des cavités microscopiques des roches d’origine éruptive et qui, depuis des centaines de siècles, sont en perpétuel mouvement. D’ailleurs, ainsi qu’il était à prévoir, ces petits mouvements changent de sens à chaque instant et constituent une sorte de danse sur place qui n’éloigne que très lentement les particules de leur position initiale, La théorie qui attribuait le mouvement brownien aux variations de la température est fausse, car, s’il est vrai que l’élévation de température augmente ce mouvement, il n’est pas vrai que ce dernier tende vers zéro quand la température tend à devenir fixe: il est plus actif pour une température élevée uniforme que pour une temperature basse, variable.
Il y a donc de bonnes raisons de croire que les chocs des molecules sont l’origine de comme ils sont celle de . Mais il y a une difficulté à concevoir la chose objectivement. La pression osmotique est centripète pour la solution, tandis qu’elle devrait être centrifuge comme celle des gaz. D’autre part, cette pression formidable de 22 atm. par molécule gramme dissoute devrait se manifester, comme celle d’un gaz sous pression par quelques effets extérieurs moins silencieux que ceux de l’osmose.
A cette seconde objection, on pourrait répondre que, la surface du liquide étant la limite infranchissable des molécules dissoutes, la pression qu’elles exercent ne peut se manifester au delà de cette surface, sur les parois extérieures au liquide. Mai cela est en contradiction avec l’explication ci-dessus du mouvement brownien.
On a essayé de tourner la première difficulté en disant: la substance dissoute cherche à occuper le plus grand espace liquide possible, comme un gaz cherche à occuper le plus grand espace libre possible. Or, les molécules, ne pouvant franchir la membrane, n’ont d’autre moyen d’occuper un plus grand espace liquide que d’attirer du liquide du côté où elles sont confinées: d’où l’osmose. Cette conception d’une solution raisonnant sagement et, au lieu de s’épuiser en vains efforts pour pousser, tournant la difficulté en attirant, est bien peu satisfaisante. Il faudrait montrer comment, par suite de quelles conditions, la pression centrifuge peut se manifester par un appel de molécules d’eau. Jusque là, il est plus sage de se contenter d’une définition analytique et de dire que est la pression qu’il faut exercer sur la solution pour empêcher l’eau d’y pénétrer, en distingant, comme l’a fait Van-t-Hoff, la pression , eftet de la pénétration de l’eau, de la cause inconnue de cette pénétration.
Nernst a proposé une explication suggestive du phénomène de l’osmose: les deux liquides émettent des vapeurs ayant la tension qui correspond à leur concentration; le plus dilué émet donc plus de vapeurs que l’autre et envoie ainsi vers l’autre plus d’eau qu’il n’en reçoit de lui. C’est parce que est maximum pour l’eau pure que c’est toujours celle-ci qui passe vers les solutions.
Nous ne nous sommes occupés jusq’ici que des mouvements de l’eau. Mais il n’existe pas de membrane rigoureusement semiperméable: celle de ferrocyanure de cuivre elle même laisse passer non seulement les quelques substances souvent citées (colorants acides, chlorure de fuchsine, ponceau 3B) mais un très grand nombre d’autres substances, y compris NaCl. Quant aux membranes animales, elles laissent passer plus on moins facilement, à peu près toutes les substances. Pour déterminer on s’est efforcé, et avec raison, de réaliser des membranes aussi semi-perméables que possible; mais de telles membranes n’existent pas dans les organismes; elles seraient incompatibles avec les échanges nutritifs et sécrétoires.
Contrairement à ce que l’on croyait autrefois, les membianes n’ont aucune action sur , qui dépend uniquement des solutions en présence. Mais elles en ont une grande, différente suivant leur nature, sur la vitesse de passage des substances dissoutes.
L’influence des membranes sur les échanges osmotiques de substances autres que l’eau est mal connue ; elle mériterait d’être étudiée à fond, car elle est d’intérêt capital pour la Biologie.
Comment les membranes interviennent-elles dans les échanges des substance dissoutes? Deux théories ont été émises, celle du crible et celle de l’imbibition.
D’après la théorie du crible, les membranes seraient percées de pores d’un certain diamètre, laisseraient passer les substances dont les molécules sont plus petites que les pores et retiendraient les autres. L’eau passe toujours parce que la molécule H2O est la plus petite (assertion confirmée, comme nuos le verrons plus loin, à propos de la vitesse des ions). Cette conceirtion simpliste peut être en partie vraie, mais elle ne suffit pas, étant en contradiction avec le fait suivant. Une membrane laisse passer les substances A, B et C; une autre laisse passer A et B et retient C; on en conclut que C a des molécules plus grosses que A ou B: mais une 3e laisse passar A ou C et retient B.
Ostwald a cherché à sauver la théorie en disant que toute membrane laisse passer une molécule quand elle laisse passer le plus gros de ses ions (voir plus loin la signification de ce terme) et retient les molécules dont un des ions est trop gros pour ses pores. Mais on trouve ici des contradictions du même genre que la précédente.
D’après la théorie de l’imbibition, une membrane laisse passer les substances auxquelles elle peut s’unir par une sorte d’acte physico-chimique constituant l’imbibition. Ainsi, quand on sépare de l’eau et de l’alcool par une vessie de porc, l’eau va vers l’alcool, parce qu’elle mouille la vessie mieux que ne fait l’alcool; quand on les sépare par une membrane de caoutchouc, l’alcool va vers l’eau parce que le premier imbibe le caoutchouc, ce que ne fait pas la seconde. De même, quand on superpose dans un vase du chloroforme, de l’eau et de l’éther, peu à peu tout l’éther passe dans le chloroforme parce qu’étant plus soluble dans l’eau que le chloroforme, il traverse la couche d’eau plus rapidement que ne fait ce dernier3.
Résumé. — Rappelons les formules de , , et et résumons leurs relations remarquables (valables seulement pour le solvant eau):
Cette égalité, à un coefficient près, tient à ce qu’il faut la même dépense d’énergie pour effectuer le même travail consistant à séparer l’eau de la solution, à vaincre l’attraction de l’eau pour les molécules, quel que soit le mode de cette séparation, évaporation, ébullition, congélation ou osmose, sauf à tenir compte des travaux accessoires de changement d’état de l’eau, et autres; et ce sont ces travaux accessoires que mesurent les coefficients différents dans les diverses formules.
La température n’intervient que dans la formula de parce que est indépendant de la température et que dans et , la température est celle d’ébullition ou de congélation du solvant qui, étant fixe, passe dans le coefficient numérique.
De ces formule on tire les relations:
Opérant à température uniforme, si l’on prend une quantité d’un gaz ou d’une vapeur quelconque occupant 1 litre à la pression ordinaire et qu’on réduise son volume, sa pression augmente et devient la même, à volume égal, quelle que soit la substance qui forme la vapeur ou le gaz. Si vraiment la pression est due au choc des molécules contre les parois du récipient, il y a là une bonne raison de croire que cette pression est indépendante de la nature des molécules et dépend seulement de leur nombre, en sorte que, à volume égal, la pression est proportionnelle au nombre des molécules et, à pression égale, le nombre des molécules est proportionnel au volume du gaz ou de la vapeur. Or nous avons vu que, si l’on pouvait vaporiser un nombre de grammes d’une substance quelconque égal à son poids moléculaire (342 gr. de sucre, ou 60 gr. d’urée), la vapeur produite occuperait, à la pression ordinaire, un volume identique (22 litres 35) quelle que soit la substance. On peut donc conclure de là que ces poids de substance contiennent un même nombre de molécules. Ainsi, toutes le solutions normales contiennent un même nombre de molécules et le facteur indiquant la concentration moléculaire est proportionnel au nombre vrai de molécules contenu dans un litre de solution: à un coefficient fixe (et inconnu) près, ou peut même dire qu’il indique leur nombre. Si donc m indique le nombre de molécules contenu dans la solution, le fait que , , et sont proportionnels à (et à lui seul, sauf intervention de la température pour ) prouve que ces variables sont indépendantes de la nature des molécules et dépendantes seulement de leur nombre. Individuellement, toute molécule, quelle que soit sa nature, exerce les mêmes , , et . C’est ce que l’on exprime en disant que , , et sont des propriétés additives. Dans la conception proposée ici de la nature de ces propriétés, nous dirons que toutes les molécules, quelle que soit leur nature, attirent et retiennent l’eau avec la même énergie: , , et sont des expressions equivalentes de cette attraction et ne diffèrent qu’en raison de travaux accessoires résultant des conditions diverses où s’exerce la rétention ou l’attraction de l’eau dans l’évaporation, la vaporisation, la congélation et l’osmose.
B. Substances ionisables.
Les lois que nous venons d’exposer ne s’appliquent qu’à des substances organiques n’ayant point de fonction acide ou basique accentuée. Beaucoup plus nombreux sont les acides et les bases, organiques ou inorganiques et leurs sels. Pour ces substances, les effets produits sont toujours supérieurs à ce qu’indique la théorie et les lois ci-dessus ne s’appliquent qu’avec une correction dont il faut indiquer la valeur et expliquer la cause.
Si l’on prend deux solutions normales, l’une de sucre (342 gr. par litre), l’autre de NaCl (58 gr. 5):
tandis que, | pour | la | 1ère | pour | la | 2è | ||
» | » | » | » | » | ||||
» | » | » | » | » | ||||
» | » | » | » | » |
Cela nous amène immédiatement à la conception des ions. Puisque nous avons vu que la force avec laquelle l’eau est retenue dans la solution ou attirée vers elle dépend uniquement du nombre des molécules, si ces solutions acides, basiques ou salines retiennent ou attirent l’eau plus qu’elles ne devraient d’après le nombre apparent de leurs molécules, c’est qu’elles contiennent plus de molécules qu’elles ne paraissent en contenir, et pour qu’il en soit ainsi, il n’y a qu’une possibilité, c’est que les molécules dissoutes soient dissociées: NaCl en Na et Cl, AzO3H en AzO3 et H, KOH en K et OH. Les éléments de cette disociation sont les ions. Ce n’est pas par cette voie qu’on est arrivé à la conception des ions, mais, au point de vue didactique, il semble avantageux et plus clair de présenter la chose ainsi. Disons par anticipation qu’on distingue sous les noms de anions et de cations les deux sortes d’ions fournis par la dissociation des molécules. Nous verrons plus loin leurs caractères différentiels.
Dans l’exemple numérique donné ci-dessus, on remarquera que les valeurs de , , , sont dans un même rapport avec celles de , , , et : elles sont égales à ces dernières multipliées par le coefficient 1,7. Ce n’est pas une circonstance fortuite. Il en est toujours ainsi. Si pour une solution donnée, acide, basique ou saline, par rapport une solution de sucre ou d’urée de même concentration moléculaire, on aura de même , et . Ce facteur par lequel il faut multiplier , , , ou pour avoir , , , au , se nomme le coefficient d’ionisation; on le désigne par la lettre et l’on a , , , . Nous apprendrons à le déterminer, mais nous voyons dès mentenant qu’après l’avoir déterminé pour l’une quelconque des valeurs tonomètrique, ébullioscopique, cryoscopique ou osmométrique, il sera valable pour les trois autres.
D’après cela, la signification du facteur est facile à comprendre. C’est le nombre par lequel il faut multiplier le nombre des molécules dissoutes pour avoir le nombre total des particules en solution: molécules restées entières plus particules (ou ions) provenant de la fragmentation de celles qui se sont dissociées (ionisées). Ainsi, dans l’exemple numérique ci-dessus, supposons qu’il agisse du NaCl. La solution étant normale, nous avons dissous 1 molécule-gramme de NaCl: disons, pour la commodité du langage, 10 molécules, étant égal à 1.7, y a, en tout 17 molécules + ions. Chaque molécule NaCl donnant 2 ions, 1 Na, 1 Cl, on voit que la seule possibilité est:
7 | Na | provenant | de | 7 | NaCl | ||||
7 | Cl | ||||||||
3 | NaCl | » | » | 3 | NaCl | ||||
Total | 17 | molécules+ions | » | » | 10 | NaCl | molécules |
Cela permet donc de reconnaître que sur 10 molécules, il y en a 3 restées entières et 7 dissociées en 14 ions.
De quoi dépend le nombre des ions. — L’expérience montre que le nombre des molécules dissociés dépend de 3 facteurs: la concentration, la température, la nature du corps.
Concentration. Le nombre des ions est, absolument, d’autant plus grand que la solution est plus diluée. Toute solution très diluée a toutes ses molécules ionisées; à mesure que l’on ajoute de nouvelles quantités du corps dissout chaque dose fournit un nouvel essaim d’ions, mai plus la concentration augmente, plus est faible le nombre d’ions libérés dans une nouvelle addition de molécules, jusqu’à une limite atteinte quand la solution est saturée. On n’a malheureusement pas trouvé de loi simple et rigoureuse définissant la relation entre l’ionisation et la concentration.
Température. L’ionisation varie avec la température d’une façon complexe, variable suivant les subtances: elle augmente en général mais parfois diminue.
Nature de la subtance dissoute. Chaque corps a son coefficient d’ionisation propre.
Tout cela complique, d’une façon fâcheuse, les question restées simples jusqu’ici.
Tandis que pour , , , et , la nature du corps n’intervenait pas et la variation par rapport à la concentration moléculaire suivait la loi très simple de la proportionnalité directe; pour , , , et , intervient un facteur qui varie suivant la nature de la substance et suivant la concentration sans relation simple.
Les effets restent, ici encore, indépendants de la nature de la substance en ce sens que , , , et restent les mêmes quelle que soit la nature des molécules ou des ions qui les déterminent, mais ils en dépendent en ce sens que, selon la nature de la substance, et pour une même concentration, de la solution, le nombre des ions libérés varie. Dissouts dans un même volume de solution, produiront le même effet que ; mais deux solutions également concentrées, de NaCl et de KCl produiront des effets très différents parce que leur ionisation sera différente.
Calcul du coefficient . — Il serait important de pouvoir déterminer la valeur de par le calcul. Ostwald a remarqué que la loi des équilibres chimiques de Guldberg et Waage s’appliquait à l’ionisation. Cette loi dit que, dans une réaction chimique où deux corps dissouts en produisent un 3e qui reste en solution, le rapport du produit des masses des constituants a la masse du constitué est constant.
Soit une solution contenant molécules dans un litre et appelons le degré de dissociation, c’est-à-dire le rapport du nombre des molécules dissociées au nombre des molécules initiales: il y aura dans la solution
anions |
cations |
molécules entières. |
Soient, maintenant, et les poids atomiques ou moléculaires des anions et des cations.
La | masse | des | anions | sera: | |
» | » | » | cations | » | |
» | » | » | molécules entières | » | . |
Et, d’après la loi, on aura:
ou
Mais, pour un corps donné, et quelle que soit la concentration, est constant.
On a donc:
On en tire:
Supposons que la moitié des molécules soit dissociée. On aura et .
Ainsi est égal à la moitié du nombre qui exprime la concentration moléculaire pour la dilution où la moitié des molécules est dissociée. On peut donc déterminer pour chaque corps par une mesure directe et déterminer , par le calcul, pour une concentration quelconque. donne de la façon la plus simple.
Si, en effet, on a dissout molécules, après la dissociation, il y aura anions cations molécules entières, soit, en tout: . Ce facteur est donc précisément le nombre par lequel il faut multiplier pour avoir le nombre total de particules; c’est donc le facteur . On a donc . La formule qui permet de calculer donnerait donc et permettrait de calculer , , , et .
Malheureusement, cette formule ne s’applique qu’aux corps faiblement dissociés: les acides forts, les bases fortes, les sels neutres ont une dissociation autre que celle qu’indique la formule5. Cela tiendrait, pense-t-on, à ce que les ions et les molécules entières forment avec l’eau des associations qui diminuent le nombre des éléments.
Van-t-Hoff a proposé pour ce cas une formule modifiée:
qui donne:
équation inutilisable parce que sa formule de résolution est trop compliquée.
Rudolphi en a proposé une plus simple:
qui donne:
Cette formule est plus maniable, mais elle a, comme la précédente l’inconvénient d’être entièrement empirique.
Enfin toutes ces formules ne s’appliquent qu’au cas où les molécules se dissocient en 2 ions: quand la dissociation fournit plus de 2 ions (par exemple SO4H2 qui fournit SO4, H, H, ou MgCl2 qui fournit Mg, Cl, Cl) la loi des équilibres chimiques devient beaucoup plus compliquée.
Dans le cas où il y a ions au lieu de 2, la formule devient , ainsi qu’il est facile de s’en assurer.
Les formules ci-dessus, , , , , nous donnent le moyen de trouver par une expérience de tonométrie, d’ébullioscopie, de cryoscopie ou d’osmométrie la valeur (ou, éventuellement ) et par conséquent de pour une concentration donnée . La valeur étant connue, nous permet de résoudre l’équation (ou ) étant connu, permet de trouver pour toutes les valeurs de .
La 2e formule étant peu rigoureuse ne donne que des résultats peu corrects dans les cas très nombreux où on voudrait l’appliquer.
Mais il y a un moyen direct de déterminer ; ce moyen est fourni par la conductivité électrique.
CONDUCTIVITÉ ÉLECTRIQUE.
Si l’on cherche à faire passer un courant électrique à travers de l’eau rigoureusement pure, on constate que le courant ne passe pas. (Il passe un courant extrêmement faible dû à une très faible ionisation de l’eau, mais pratiquement ce fait est négligeable). Il en est de même pour les solutions des corps de la première catégories (sucre, urée, alcool, etc.). Au contraire, le courant passe dans les solutions plus ou moins ionisées, mais en les décomposant.
Voici à quelle interprétation du phénomène on a été conduit.
Les ions sont de denx sortes: les uns cations ont des charges électriques positives, les autres anions des charges négatives. Les molécules des électrolytes sont formées de l’union d’un (ou plusieurs) cation et d’un (ou plusieurs) anion dont les charges se saturent l’une l’autre, en sorte qu’elles sont électriquement neutres. L’ionisation consiste dans la dissociation de la molécule en ses ions constituants qui deviennent libres dans la solution, laquelle n’en reste pas moins neutre dan son ensemble.
Quand on plonge dans la solution les deux électrode d’une pile, ces életrodes présentent une différence de potentiel, l’anode ayant une charge + et la catode une charge — . Les cations + sont attirés par le catode — et les anions — par l’anode +. Au contact des électrodes ils perdent leurs charges en saturant une quantité d’électricité égale à celle qu’ils portaient et que la pile doit fournir de novo pour mantenir aux électrodes leur différence de potentiel.
Lorsqu’on ferme le circuit d’une pile par un conducteur métallique, celui-ci conduit le courant sans éprouver aucun changement chimique. Dans le cas actuel le phénomène est tout autre. Les solutions électrolytiques n’ont pas trace de conductibilité métallique, et leur conductivité est liée au transport des ions: c’est pour cela que le passage du courant ne peut se faire qu’avec décomposition de l’électrolyte. Ce serait se faire du phénomène une idée non conforme à la conception proposée que de concevoir un courant préexistant entraînant les ions: les ions sont attirés, en raison de leurs charges vers les électrodes de signe opposé et ces déplacements des ions sont le courant lui-même.
On a objecté que les ions et leurs charges pourraient être un effet du courant, lequel scinderait les molécules et chargerait leurs éléments constituants. Cela est inadmissible, car: 1° , , et nous montrent les ions existants sans intervention d’un courant; 2° un courant, si faible qu’il soit décompose toujours un électrolyte. Si le courant est très faible, la décomposition peut être très lente; si les électrodes se polarisent, il peut s’arrêter, mais la décomposition commence toujours. Avec des électrodes impolarisables, on a pu décomposer de l’eau acidulée avec un voltage si faible qu’il fallait plusieurs mois pour obtenir 1cmc d’H. Cela prouve que les ions préexistent dans la solution, car s’il n’en était pas ainsi, il foudrait une certaine énergie pour rompre les molécules et pour charger les ions, et la décomposition ne commencerait que lorsque le courant aurait fourni une énergie égale à cette limite inférieure.
Le fait que, dans son ensemble, la solution ionisée est électriquement neutre, montre que les ions provenant de la dissociation d’une molécule ont des charges dont la somme algébrique est nulle. Cela permet de se faire une idée bien objective de la valence et de reconnaître l’égalité de charge de tous les ions, a un coefficient près, qui est celui de la valence.
Ainsi, parlant de la valeur des charges, on peut dire que NaCl étant neutre, .
De même, KCl étant neutre, .
Donc , et ainsi de même, de proche en proche pour tous les cations et anions monovalents.
D’autre part, dans CaCl2, Ca devant saturer doit avoir une charge deux charges , ce qu’on exprime en écrivant . De même on a, dans AzO4H2, et , dans PO4NaH2, , et , etc.
Le charge de l’ion monovalent est considérée comme étant l’unité électrique la plus petite qui puisse exister, l’électron.
En résumé, on peut dire que toutes les charges sont égales et que les ions portent un nombre de charges égal à leur valence.
Puisque les ions seuls et non les molécules conduisant le courant, la condutivité électrique dépend, non comme , , et du nombre total des particules libres (molécules + ions), mais du nombre des ions seulement, en sorte qu’elle mesure directement l’ionisation, la dissociation. Suivant la conception d’Arrhenius, est proportionnel au nombre des ions.
On mesure la conductivité en prenant l’inverse de la résistance exprimée en Ohms, soit au moyen d’un pont de Wheastone qui permet de comparer la résistance de la solution à une résistance connue, soit en notant directement (dans une expérience instantanée ou en renversant fréquemment les poles pour éviter l’électrolyse et la polarisation) la force électromotrice au moyen d’un Voltmètre et l’intensité au moyen d’un Ampère-mètre et en appliquant la loi d’Ohm . C’est le premier procédé qu’on emploie le plus souvent.
On est convenu de prendre pour mesure de la conductivité d’une solution la conductivité d’un cylindre de cette solution ayant pour hauteur 1cm et pour bases 1cm2. Cette conductivité dépend du nombre d’ions contenu dans ce cylindre de 1cm3. Elle est donc fonction du degré de dissociation mai ne donne pas d’indications immédiates sur ce degré. Si, en effet, l’on dilue une solution, sa dissociation augmente mais moins vite que son volume, en sorte que 1cm3 contient moins d’ions et que sa conductivité diminue. Dans ce cas, la conductivité et la dissociation varient donc en sens inverse. Pour tirer de l’expression de la conductivité des indications simples et immédiates sur la dissociation, il faut lui donner une autre forme où il soit tenu compte de la totalité des ions que contient la solution. Un calcul bien simple en donne le moyen.Soit la conductivité d’une solution de concentration . Si molécules occupent 1 litre, 1 molécule occupera litres ou cm3. Puisque chaque cm3 a la conductivité , la solution entière (si l’on dispose l’expérience de manière que tous les cm3 soient traversés séparément par une portion du courant) aura pour conductivité . Cette expression nouvelle est ce qu’on appelle la conductivité moléculaire: c’est celle qu’on observerait si une quantité de solution contenant 1 molécule-gramme occupait dans le courant un cylindre n’ayant que lcm de hauteur et à bases assez large pour contenir la molécule quel que soit le volume de l’eau où elle est dissoute, afin que tous les ions participent de la même manière à la condution des courant, quelle que soit la dilution. On représente la conductivité moléculaire par le symbole , l’indice indique en litres, le volume de solution qui contient 1 molécule gramme.
Si on appelle et les nombres d’ions libres dans deux solution contenant une molécule d’une même substance dissoute dans les volumes et en litres, on a, d’après Arrhenius:
A mesure que l’on dilue une solution, on voit sa conductivité moléculaire augmenter, mais non pas indéfiniment. À partir d’une certaine dilution, d’ailleurs très-grande, atteint une limite qu’il ne dépasse plus. On pense qu’alors, toutes le molécules sont ionisées, en sorte que le nombre des ions ne peut plus augmenter. On a atteint alors la conductivité moléculaire limite . Dans ce cas, la formule ci-dessus s’applique encore et l’on a:
représente toujours le nombre d’ions libres dans la solution considérée; représente le nombre total d’ions que fournissent les molecules dissoutes quand leur dissociation a été complète. Or ce rapport est le même que celui du nombre des molécules dissociées au nombre des molécules dissoutes: il représente donc une autre définition de , en sorte que l’on peut écrire: , ce qui veut dire que le degré de dissociation d’une solution donnée est égal au rapport de la conductivité moléculaire de la solutions à la conductivité moléculaire limite ou maxima de la même substance. La valeur de constitue pour chaque substance
une constante physique, qui a été mesurée pour un grand nombre de corps. Elle permet de calculer le d’une solution quelconque de ce corps (à la même température), lorsqu’on connaît la conductivité moléculaire de cette solution. C’est généralement par ce moyen simple et précis que l’on détermine et par suite le facteur .
Voici un tableau des valeurs des conductivités moléculaires des quelques uns des électrolytes les plus usités dans la parthénogénèse, en unités internationales, à 18°.
Nacl | 108,99 | 101,95 | 92,02 | 80,94 | 74,35 | |
KCl | 130,10 | 127,34 | 122,43 | 102,41 | 98,27 | |
HCl | . . . . | 370 | 351 | . . . . | . . . . | |
LiCl | 98,88 | 92,14 | 82,42 | 70,71 | 63,46 | |
AzH4Cl | 133,6 | . . . . | . . . . | . . . . | . . . . | |
AzO3H | . . . . | 368 | 350 | 324 | 310 | |
SO4H2 | . . . . | 616 | 450 | 410 | 396 | |
PO4H3 | 318 | 255 | . . . . | . . . . | 66 | |
C2H4O2 | 107 | 14,30 | 4,60 | 2,01 | 1,32 | |
AzH3 | 66 | 9,6 | 3,3 | 1,35 | 0,89 | |
C2O4K2 | 250,4 | 225,8 | 199,6 | . . . . | 147,4 | |
CaCl2 | 230,4 | 206,8 | 186,6 | 149,8 | 135 | |
(AzO3)2Ca | 223,8 | 199 | 165 | 131,4 | 111,8 | |
(C2H3O2)2Ca | 165,6 | 143,8 | 108 | 72,6 | 52,6 | |
SO4Ca | 229,8 | 154 | . . . . | . . . . | . . . . | |
AzO3AzH4 | 126,1 | 118 | 106,6 | 94,5 | 88,8 | |
MgCl2 | 230,2 | 202,6 | 169,4 | 143 | 126,8 | |
MgSO4 | 222,8 | 152,2 | 99 | 70,4 | 57,8 | |
PO4HNa2 | . . . . | 162 | 132 | 100,5 | 74 | |
PO4H2K | . . . . | 88,5 | 79,1 | 69,6 | 64,2 | |
PO4H3 | . . . . | 255 | 149,4 | 71,9 | 66,6 | |
NaOH | . . . . | 203,4 | 195,4 | 174,1 | 157 |
Electrolyse.
Le nombre fait connaître le nombre d’ions libres dans la solution à un moment donné, au moment précis de l’observation. Mais si on laisse passer pendant quelque temps un courant continu, les ions, peu à peu, s’accumulent aux électrodes et se séparent ainsi de la masse du liquide. Les conditions d’équilibre définies par la loi de Guldberg et Waage sont donc détruites: Pour les rétablir un nouvel essaim d’ions prend naissance par dissociation de nouvelles molécules; ces ions se portent à leur tour aux électrodes, de nouvelles molécules se dissocient encore, et ainsi de suite, tant qu’il y a des molécules en solution: c’est l’électrolyse.
L’électrolyse nous met donc sous les yeux et nous rend tangibles les ions que nous ne connaissions jusqu’ici que par leurs effets , , , , et . Pour les corps binaires tels que NaCl, HBr, etc., il n’y avait pas d’incertitude, mais pour ceux formés de plus de deux atomes, il n’en était pas de même. C’est elle qui nous apprend que AzO3H se dissocie en AzO3 et H et non autrement, H2O en H et OH, KOH en K et OH, SO4H2 en SO4, H et H, PO4Na2H en PO4, Na, Na et H, etc., etc., et nous permet de reconnaître que c’est toujours l’ion hydrogène ou métallique qui porte la charge + et l’autre atome ou groupe d’atomes qui porte la charge — . (Cf. p. 78).
Mais il faut tenir compte des réactions secondaires qui se produisent aux électrodes: Na y donne NaOH et H, SO4 y donne SO4H2 et O etc.
VITESSE DES IONS.
Lorsqu’on électrolyse une solution, au fur et a mesure que le liquide est décomposé, la concentration diminue. Il peut se faire que cette perte de concentration soit uniforme. Si, dans ce cas, on sépare la solution en deux moitiés correspondant chacune à une électrode par une membrane perméable aux ions et imperméable aux molécules, on constate que la perte de concentration est, à chaque instant, la même dans les deux moitiés de la solution. Ainsi, si on électrolyse de SO4K2, on constate que, lorsque deux atomes de K ont été transportés à la catode et une molécule de SO4 à l’anode, il manque molécule de SO4K2 dans chaque moitié de la solution. Si, au contraire, on électrolyse du NaCl on trouve que la perte de concentration est environ deux fois plus forte dans la moitié catodique du bain que dans la moitié anodique. Cela tient a ce que, dans le déplacement des ions, l’anion Cl fait les du chemin et le cation Na seulement.
On peut s’objectiver la chose par le schéma ci-dessous (fig. 1). Avant le passage du courant, les ions Cl et Na sont uniformément répartis des deux côtés de la membrane m. Si le transport des ions Cl et celui des Na se faisait avec la même vitesse, il y aurait symétrie des deux côtés de la membrane et le nombre des molécules non décomposées serait le même des deux côtés: c’est le cas du SO4K2. Mais si les ions Cl marchent plus vite que les Na, on voit qu’il sortira plus d’ions Cl du compartiment — qu’il ne sortira d’ions Na du compartiment +, en sorte que le nombre des molécules non décomposées sera plus grand dans le compartiment + que dans le compartiment — , et que la perte de concentration sera plus forte dans celui-ci que daus celui-là. On en conclut que les ions Cl ont une mobilité ou, comme on dit, une vitesse deux fois plus grande que les ions Na.
Les pertes de concentraction aux deux électrodes peuvent être représentées par la fraction de molécule décomposée au niveau Fig. 1 de chacune d’elles quand une molécule entière a été décomposée dans l’ensemble du bain; et, pour chaque molécule décomposée, ces deux fractions sont complémentaires, leur somme étant égale à l’unité. Si donc on appelle la perte de concentration à la catode (facteur de transport de l’anion), sera la perte à l’anode (facteur de transport du cation). La vitesse des anions et celle des cations étant proportionnelles à ces pertes de concentration, ou a la relation:
Voici un tableau de valeurs à la température ordinaire pour le électrolytes les plus usités dans la parthénogenèse.
KCl | 0,508 | 0,512 | 0,514 | 0,515 |
NaCl | 0,627 | • • • • | 0,634 | 0,648 |
LiCl | 0,700 | • • • • | 0,730 | 0,740 |
AzH4Cl | 0,508 | • • • • | 0,514 | 0,514 |
CaCl2 | 0,680 | • • • • | • • • • | 0,690 |
MgCl2 | 0,680 | • • • • | • • • • | 0,710 |
KI | • • • • | • • • • | 0,511 | 0,511 |
NaI | • • • • | 0,626 | • • • • | • • • • |
KBr | • • • • | • • • • | 0,520 | • • • • |
SO4K2 | • • • • | • • • • | • • • • | 0,500 |
SO4Na2 | • • • • | 0,630 | • • • • | 0,640 |
MgSO4 | • • • • | • • • • | 0,656 | • • • • |
CO3K2 | • • • • | • • • • | 0,440 | • • • • |
CO3Na2 | 0,480 | • • • • | • • • • | 0,550 |
KOH | 0,740 | • • • • | 0,740 | • • • • |
NaOH | 0,840 | 0,800 | • • • • | 0,830 |
HCl | 0,210 | 0,160 | 0,170 | • • • • |
SO4H2 | 0,210 | • • • • | • • • • | 0,170 |
AzO3Na | 0,614 | • • • • | • • • • | • • • • |
Les pertes de concentration et sont directement proportionnelles à l’intensité du courant; il en est de même des vitesses absolues des cations et des anions, mais le rapport et , ce dernier exprimant les vitesses relatives des ions, en sont indépendants.
Ces mêmes rapports varient avec la concentration, mais sauf pour les concentrations très fortes, la variation est peu accusée. Enfin la température, outre son influence sur , augmente la vitesse des ions.
La conductivité d’une solution a pour mesure la quantité d’électricité qu’elle peut transporter dans l’unité de temps. D’après la conception d’Arrhénius, cette électricité est transportée toute entière par les ions; elle a donc pour facteurs, le nombre des ions, leurs valences et leurs vitesses.
Si donc la molécule est formée de anions et de cations, ayant les valences et et les vitesses et , étant le nombre de molécules par litre et le degré de dissociation, il y aura anions et cations, et les quantités d’électricité transportées dans l’unité de temps seront, à une constante près: . Soit cette constante, on aura:
Si la solution contient une seule molécule-gramme complétement dissociée, on aura , , et
Si la molécule est formée de 2 ions monovalents,, et l’on a:
On peut au moyen d’une convention rendre cette formule simple applicable à tous les cas.
Remarquons d’abord que toujours , car si un ion devient di- ou trivalent, il y en a 2 ou 3 fois moins dans la molécule que s’il était monovalent: ainsi, dans SO4Mg comparé à SO4Na2, 1Mg++ tient la place de 2Na+. Le produit est égal au nombre de valences de l’ion le plus valent de la molécule. Donc, sous la réserve qu’il faudra multiplier par la valence de l’ion le plus valent de la molécule, on peut considérer comme générale la formule ci-dessus. C’est pour cela que, dans les tables, on donne en général la conductivité de NaCl, de KOH, mais de SO4N2, Fe2Cl6, etc., ces coefficients , signifiant que les valeurs de s’appliquent à des concentrations égales à ou de celles indiquées par et que, pour avoir les valeurs de correspondant à la concentration , il faut multiplier par 2 ou par 3 les nombres indiqués dans les tables. En d’autres termes, les valeurs de indiquées dans les tables supposent les valences ramenées à l’unité, et pour avoir les valeurs vraies de , il faut multiplier celles des tableaux par le chiffre de la valence de l’ion le plus valent de la molécule.
Le facteur est la quantité d’électricité transporté par un ion-gramme (c’est-à-dire un pois d’ions égal au poids atomique ou moléculaire de cet ion) monovalent entre des électrodes distantes de lcm, avec une différence de potentiel de 1 volt. Cette quantité, indépendente de la nature de l’ion est de 96537 Coulombs.
Cette relation permet de déterminer les valeurs de et de . Elle donne en effet:
D’autre part, de l’équation , on tire:
D’où
Il suffit donc, pour avoir et de multiplier la conductivité moléculaire de la solution considérée par l’abaissement de concentration correspondant et de multiplier le produit par le facteur . Si l’on ne veut que les vitesses relatives, le plus souvent suffisantes dans la pratique, on peut supprimer et écrire , .
Voici un tableau des vitesses relatives des ions les plus usités en biologie. Pour avoir les vitesses absolues en centimètres par seconde pour 1 volt par centimètre, en fonction de l’Ohm international, il suffit de multiplier les nombres ci-dessous par le facteur 0,00001035.
Vitesses relatives des divers ions à 18° dans des solutions entièrement dissociées.
H = 318 | Mg = 92 | C2H3O2 = 35 |
OH = 174 | Ca = 103,6 | CHO2 = 47 |
Cl = 65,4 | Ba = 111 | C3H5O2 = 31 |
Br = 67,6 | AzO3 = 61,8 | C2O4 = 126 |
I = 66,4 | SO4 = 136,8 | |
Fl = 46,6 | CO3 = 140 | |
K = 64,7 | SCAz = 56,6 | |
Na = 43,6 | PO4H2 = 33,5 | |
Li = 33,4 | ||
AzH4 = 64 |
Il est facile d’en calculer d’autres au moyen des tables donnant et par les diverses concentrations et les diverses températures, au moyen des formules ci dessus.
Les vitesses des ions sont des constantes physiques que l’on pourrait être tenté de rapporter à des propriétés particulières, à des énergies propres des ions. Mais il est plus simple d’admettre, comme l’a suggéré Langevin qu’elles dépendent du frottement contre le liquide solvant, et par conséquent du volume des ions: ainsi les ions les plus rapides seraient aussi les plus petits et l’échelle de leurs vitesses correspondrait à l’échelle des leurs tailles en ordre renversé. C’est à ce titre que les vitesses des ions sont intéressantes pour le biologiste.
Les ions H et OH sont de beaucoup les plus rapides et par suite les plus petits: tandis que les vitesses des autres ions se tiennent aux environs de 50, celle de OH atteint 167 et celle de H, 325.
Des conséquences importantes résultent de ce fait: 1° L’eau est le liquide dont les molécules sont de beaucoup les plus petites, ce qui explique qu’elle passe toujours à travers les membranes (à la condition qu’elle les mouille), plus facilement que les substances qu’elle tient en solution; 2° Cela expliquera diverses particularités de l’électrisation de contact dont nous allons parler dans un instant.
Conception objective des ions.
Comment concevoir la présence d’ions libres dans la solution?
Une première objections vient à l’esprit: si dans une solution de NaCl, il y a des Na libres, pourquoi ne décomposent-ils pas l’eau; s’il y a des Cl libres, pourquoi ne se revèlent-ils pas par leur odeur? On répond que, ce qui décompose l’eau, ce n’est pas l’atome Na, mais la molécule Na2, ce qui sent la chlore, ce n’est pas l’atome Cl, mai la molécule Cl2. Les ions eux-mêmes différent des atomes par leurs charges: l’ion Na est l’atome Na moins un électron négatif, ces sorte qu’il garde une charge positive et c’est pour cela qu’on le désigne par Na+. De même pour le chlore, l’atome est Cl, l’ion Cl-. Deux ions Na+ ou Cl- se repoussant par leurs charges de même signe, ne peuvent s’unir en une molécule Na2 ou Cl2. Ils le peuvent s’ils se déchargent au contact d’une source électrique de signe contraire, comme dans l’électrolyse; aussitôt ils repassent à l’état d’atomes, qui se combinent en molécules et leurs propriétés chimiques apparaissent. Nernst dit même expressément que les charges saturent les affinités chimiques. Tout cela cependant garde un caractère hypothétique, aussi, nombre de bons esprits, tout en reconnaissant les immenses services rendus par la théorie des ions et la façon remarquable dont elle cadre avec de nombreux faits, doutent qu’elle corresponde à la réalité. La conception d’un certain nombre de molécules dissociées en présence d’autres molécules restées entières est aussi peu satisfaisante, parce qu’on conçoit mal cette différence d’état entre des molécules identiques. On échappe à cette difficulté en admettant que ce ne sont par certaines molécules qui sont ionisées, mais que toutes se rompent de temps à autre et se reconstituent un instant après, un ion Cl-, par exemple, libre en ce moment, ayant été l’instant d’avant combiné avec un ion Na+, tandis qu’il sera combiné l’instant d’après avec un autre ion Na+. Il y aurait une sorte de danse incessante des ions se lâchant et se prenant en molécules, en sorte que, vu le très grand nombre des particules, le rapport de ceux qui sont libres à ceux qui sont associés reste invariable, puisqu’il dépend non du facteur temps mais des conditions physiques de la solution, et constitue le de la solution.
Applications à la chimie et à la physiologie.
Cela nous entraînerait trop loin de notre sujet de traiter en détail cette vaste question. Aussi ne ferons nous qu’indiquer quelques faits pour montrer la haute importance de la théorie des ions.
Acides. — Dans une solution d’un acide AH (A étant l’anion), il y a des molécules AH, des ions A- et des ions H+. Ce sont ces derniers qui donnent l’acidité actuelle de la solution; les H combinés en molécules AH donnent l’acidité potentielle. Si, en effet, on enlève des ions H en les saturant par les ions OH d’une base, l’équilibre se trouvant détruit, de nouveaux essaims d’H deviennent libres et passent de l’état potentiel a l’etat actuel, jusqu’à ce que tous les AH aient été dissociés. La notion d’acide fort et d’acide faible devient objective. Au point de vue de l’acidité totale, une molécule d’acide acétique vaut une molécule d’acide azotique, puisque l’une et l’autre sont également saturées par une molécule de base. Mais l’acide azotique a une acidité actuelle plus forte que l’acide acétique parce qu’il est plus fortement dissocié et fournit plus d’H libres à un moment donné (Cf. p. 74, note). Il résulte de là qu’un acide pur, sans eau et par conséquent non ionisé, n’a aucune acidité actuelle, même à l’état liquide: on constate en effet que SO4H2 pur ne rougit même pas le papier de tournesol. Il en est de même si l’acide est dissous dans un solvant non ionisant comme la glycérine.
Bases. — Les mêmes faits se retrouvent avec les bases.
Poisons, médicaments, antiseptiques. — Ici aussi l’activité est proportionnelle au nombres d’ions libres. Ainsi s’explique que les actions caustique, toxique, thérapeutique et antiseptique de Hg, par exemple, soient fortement atténuées dans l’excipient glycérine, que le chlorure d’Hg, très dissocié, soit plus actif que le bromure moins dissocié, et celui-ci plus actif que le cyanure qui l’est moins encore (sauf à tenir compte sans ce dernier cas de la toxicité surajoutée des ions Cy). L’addition de NaCl à HgCl2 diminue son activité en abaissent la dissociation etc. etc. La conductivité électrique étant proportionelle à la teneur en ions libres, mesure l’activité de la substance.
Théories de la Parthénogénèse.
Après cette longue digression, revenons à la parthénogénèse. Nombreuses sont les tentatives d’explication. Les voici brièvement résumées dans l’ordre chronologique.
D’après Loeb, en 1899, le spermatozoïde déterminerait la fécondation en introduisant dans l’œuf certains ions qui n’y existaient pas ou qui s’y trouvaient à une concentration insuffisante; les solutions hypertoniques riches en K ou Mg, au moyen desquelles il déterminait alors la parthénogénèse, agiraient de le même manière. Mais il n’a jamais été démontré que les ions de la solution pénètrent dans l’œuf. D’autre part, Yves et Marcel Delage ont montré, par des dosages, que Mg, qui ajouté à l’eau de mer détermine la parthénogenèse, est moins abondant dans le spermatozoïde que dans l’œuf vierge. C’est ici le lieu de rappeler qu’on n’est nullement fondé à croire que les solutions déterminent le résultat par le même moyen que le spermatozoïde. Dans le même ordre d’idées, Loeb a invoqué aussi la dilution, dans ses solutions, de certains ions peut être inhibiteurs (Na, Ca). Mais plus tard il a pu constater que, dans la plupart des cas, on peut choisir Na pour rendre la solution hypertonique.
L’année suivante, Bataillon émit l’idée, depuis reprise par Loeb, que l’œuf est on équilibre osmotique avec l’eau de mer, et qu’en rendant celle-ci hypertonique par l’addition de certains sels, on provoque une déshydratation de l’œuf, qui serait le facteur essentiel de la parthénogénèse. Yves Delage a fait remarquer (en 1900, Congrès de Berlin) que le spermatozoïde produit une déshydratation de l’œuf qu’il féconde. On voit en effet le pronucleus mâle, très petit et formé de nucléines condensées, se gonfler, dans son voyage à travers le cytoplasme, à la rencontre du pronucleus femelle, jusqu’à devenir aussi gros que celui-ci. Ce gonflement ne peut être dû qu’à une absorption d’eau et cette eau ne peut être empruntée qu’au cytoplasme. Loeb, abandonnant sa théorie précédente explique la parthénogénèse par une déshydratation et une action spécifique des ions. Cette action spécifique n’est pas définie et la question de savoir si elle implique ou non une pénétration dans l’œuf des ions actifs de la solution est laissée de côté.
En 1901, Loeb renonce à l’idée d’action spécifique pour rapporter au phénomène osmotique la totalité du résultat: il a cru constater, en effet, que toutes les solutions de même pression osmotique (à la condition de ne pas contenir de substances nocives) sont équivalentes. Il renonce de même à invoquer la suppression de l’action d’ions inhibiteurs, en constatant que l’eau de mer concentrée est active, et l’action des charges électriques des ions en constatant que les solutions sucrées hypertoniques sont suffisantes. Toutes ces conclusions sont d’ailleurs trop absolues: il est inexact que la nature et les proportions des sels constituant la solution hypertonique soient indifférentes; d’autre part, on n’a jamais fait développer un œuf dans une solution sucrée dépourvue d’électrolytes6. Contre cette intervention exclusive du facteur hypertonie se dressent les expériences de Yves Delage (confirmées par Garbovski) qui obtient jusqu’à 100% de parthénogénèses expérimentales, chez les Astéries, au moyen d’eau de mer chargée de CO2 diluée et rendue hypotonique par l’addition de 15% d’eau distillée. Loeb lui même a obtenu des blastules chez le Chætoptère avec de l’eau de mer rendue hypotonique et additionnée de KCl. L’action spécifique des ions est indéniable. Reste à définir ce terme de spécificité qui, tel quel, n’explique rien.
En 1902, Loeb émet l’idée ingénieuse que les ions actifs des solutions agissent comme catalyseurs, en accélérant la segmentation (qui commence tardivement dans l’eau de mer naturelle) et en lui permettant de se produire avant que l’œuf se désintègre et meure.
En 1903, Matthews, assure que les agents chimiques parthénogénisants sont ceux qui liquéfient le protoplasma. Le centrosome pourrait être une parcelle d’un enzyme liquéfiant produite, ainsi que cela a été observé chez les Levures, par un commencement d’asphyxie. Cette hypothèse demanderait à être appuyée sur des faits plus nombreux et plus précis.
Enfin Loeb, en 1906, rejetant toutes ses théories antérieurs, attribue aux solutions hypertoniques le rôle d’un agent oxydant. Il se fonde sur ce que, en l’absence d’oxygène, ces solutions sont inefficaces. Il y a longtemps que l’on sait que l’oxygène est nécessaire à la plupart des processus physiologiques; ses expériences le montrent une fois de plus, mais elles ne prouvent nullement que les solutions hypertoniques agissent uniquement comme agents d’oxydations. On pourra admettre sa nouvelle théorie quand il aura montré que l’oxygène détermine la parthénogénèse en dehors de l’intervention des solutions hypertoniques7.
Les derniers expériences de Yves Delage ont mis hors de doute l’action spécifique des substances chimiques qui entrent dans la composition des solutions parthénogénisantes. En comparant le pourcentage des œufs qui se segmentent et de ceux qui restent indivis, tandis qu’il fait varier la composition de la solution, il a établi quelques faits dignes d’être pris en consideration.
Certaines substances, ajoutées en quantité insuffisante pour faire varier sensiblement la pression osmotique de la solution, augmentent dans des proportions notables le pourcentage des réussites: tels sont en particulier le sulfite de soude et le chlorure de Nickel. Les chlorures des autres métaux de la même série présentent des propriétés adjuvantes très différentes: l’action du Fer est nulle, celle des Manganèse faible, celle du Cobalt peu inférieure à celle du Nickel. On peut penser à une action catalysante, le sel métallique servant de véhicule à quelque substance qu’il emprunte d’un côté et cède de l’autre, tandis qu’il se rétrouve identique à lui-même après cette double opération.
D’autre part, les œufs, en apparence identiques, non seulement d’une même espèce, mais d’un même individu et aussi d’un même ovaire sont impressionnés diversement par un même réactif: soumis à des traitement identiques, les uns se développent, les autres non. Certaines expériences autorisent même à parler d’œufs sensibles au sulfite de soude, au Manganèse, au Cobalt ou au Nickel. Sous ces différences, qui compliquent singulièrement les expériences et obscurcissent leur interprétation, se cachent sans doute des phénomènes simples qui n’ont pas encore été démêlés.
Parmi les explications entrevues, il en est une ou plutôt une catégorie, qui fait appel aux charges électriques des ions et aux propriétés des solutions colloïdales. Elle est à peine ébauchée, mais paraît très suggestive et c’est par quelques indications sur ce sujet que nous terminerons ce trop long exposé.
Electrisation de contact.
Toute paroi en contact avec une solution électrolytique (que cette paroi soit celle qui renferme la solution ou celle d’un corps immergé) reçoit de la solution une charge électrique positive ou négative. Perrin a montré que la charge est positive quand la solution est acide, négative quand elle est alcaline, des traces très faibles d’acidité ou d’alcalinité suffisant d’ailleurs à produire le résultat. Cette charge produite par un liquide électriquement neutre semble au premier abord paradoxale. Aidé par une suggestion de Langevin, Perrin en a proposé l’explication suivante. Les ions H des liqueurs acides et OH des liquides alcalins ont, comme nous l’avons vu, des vitesses très supérieures à celles des ions auxquels ils sont associés pour former les acides ou les alcalis, et il semble que l’on soit en droit d’en conclure (voir p. 85) qu’ils sont plus petits. Dès lors, si l’on imagine une paroi en contact avec la solutions, les ions H+ ou OH— formeront à la paroi un revêtement immédiat (fig. 2) tandis que l’ion associé Cl— ou Na+ en sera tenu écarté par son diamètre même. La paroi prendra donc le signe des ions les plus voisins. La chose ainsi décrite et surtout ainsi figurée n’est qu’une schématisation très grossière, mais qui suffit à objectiver le phénomène réel plus complexe. La grandeur de la charge varie, naturellement, dans le même sens que la concentration. Il y a donc au contact de la paroi une couche double, appartenant au liquide, mais dont la partie externe confine immédiatement à la paroi, lui adhère et est immobilisée par elle, tandis que l’intérieure, de signe contraire, reste partie constituante du liquide et mobile comme lui. Si l’on fait passer un courant électrique dans le liquide, la lame interne de la couche double est entraînée, en raison de sa charge, vers l’électrode de signe contraire, tandisque la lame externe reste adhérente à la paroi. Si celle-ci est fixe, le courant ne peut la déplacer, mais si elle appartient à une particule très petite, en suspension dans le liquide et par conséquent susceptible d’être mue par une force très faible, les ions qui la revêtent sont entraînés vers le pôle de nom contraire et charrient vers ce pôle la particule à laquelle ils adhèrent. Là est l’explication des phénomènes de cataphorèse et d’osmose électrique (réversible) qui permettent de mesurer ces charges mais dont ce n’est pas le lieu de s’occuper ici.
Dans les sels neutres, les ions constituants, ont des différences de vitesse et par suite de taille beaucoup moins grandes que la différence entre la vitesse d’un ion H ou OH et celle de l’ion associé; il est donc naturel que la charge de la paroi se montre très faible dans les solutions neutres. Il est à remarquer cependant que, même en choisissant des sels où cette différence soit aussi grande que possible (BrLi, où ce rapport ), Perrin n’ait pu observer aucune charge, et cela jette quelque doute sur la valeur de l’interprétation.
Si l’influence des ions monovalents autres que H et OH est insignifiante ou nulle, il n’en est pas de même de celle des ions polyvalents, et leur action croît très rapidement avec la valence: la grandeur de la charge compense l’infériorité due au diamètre. Ainsi la charge communiquée par un même nombre d’ions H+ est beaucoup moindre lorsque ces ions sont associés à des ions SO4-- dans l’acide sulfurique que lorsq’ils sont unis à des ions Cl— dans l’acide chlorhydrique. Si à une solution acide (HCl) communiquant une certaine charge + on ajoute, même en quantité très minime, un sel contenant un ion polyvalent, si cet ion est positif (Mg++Cl— Cl— ), la charge n’est pas sensiblement modifiée; mais si cet ion est négatif (SO4--K+K+), la charge est fortement diminuée et peut être annulée ou même changer de signe. Perrin admet que, dans ce cas, les ions SO4 sont attirés près de la paroi par la couche d’ions H qui la revet et neutralisent tout ou partie de leur charge. Les ions polyvalents de même signe sont sans action parce qu’ils ne sont pas attirés au voisinage de la paroi. Perrin compare très heureusement cette attraction à un mordançage. Même chose pour les liqueurs alcalines, mutatis mutandis.
Solutions colloïdales.
Les substances de la première des catégories que nous avons étudiées, sucre, glycerine, urée, etc. se divisent dans l’eau en leurs molécules constituantes. Celles de la 2e catégorie, les électrolytes, HCl, KOH, NaBr, etc., font de même, et, en outre, tout ou partie de leurs molécules se subdivisent en leurs ions constitutifs. Il existe une troisième catégorie de substances qui, tantôt toujours, tantôt dans certaines conditions de préparation seulement, se divisent en particules qui, bien que fort petites, constituent des amas considérables de molécules. Ces particules sont appelées granules, l’état dans lequel est la substance divisée en granules est dit colloïdal, et le système formé par les granules et le liquide ambiant est appelé sol pour le distinguer des solutions vraies. Selon la nature du liquide, on distingue des hydrosols, des glycérosols, des alcoosols, etc. Nous ne nous occuperons que des premiers, qui sont de beaucoup les plus importants pour le biologiste.
Les granules sont trop petits pour être visibles au microscope ordinaire; mais on parvient à les voir au moyen de l’ultra-microscope, consistant dans la combinaison d’un fort grossissement avec un éclairage latéral. Les granules apparaissent alors comme une fine poussière brillante, animée du mouvement brownien. On ne peut les mesurer directement, mais on peut les compter, savoir, à peu près, combien il y en a dans un volume donné de solution; comme on sait d’autre part le volume total de la substance, d’après sa denisté et le poids qu’en contient la solution, on en déduit le volume des granules et par suite leur diamètre, en les supposant sphériques. On a trouvé par cette méthode que le diamètre des granules est de l’ordre du millième de micron, unité que l’on représente par le symbole μμ: il varie de 1μμ à 1μ. Les molécules sont d’un ordre de grandeur environ 100 fois moindre, en sorte qu’un granule contient, en moyenne, 1003, soit un million de molécules. La distance moyenne entre les granules est de l’ordre du μ.
Les sols sont intermédiaires aux solutions et aux suspensions, se rapprochant de celles-ci ou de celles là par certains caractères, s’en écartant par d’autres. Comme les dernières ils sont formés de particules visibles au moyen de certains artifices, diffusent la lumière, la polarisent; comme elles ils sont sans aucune action sur la tension de vapeur, le point d’ébullition et de congélation et sur la pression osmotique sauf pour les solutions concentrées sans grand intérêt par la biologie. Il diffèrent par là des solutions; mais, sous le rapport de la conductivité électrique ils s’en rapprochent et prennent place entre les solutions électrolytiques et les non électrolytiques: les granules possèdent en effet des charges électriques, mais très faibles relativement à leur masse et conduisent le courant, mais très peu. Laissant de côté leur action sur la lumière, nous examinerons ce qui est relatif à leurs charges électriques.
Si l’on établit une différence de potentiel entre deux électrodes plongeant dans un hydrosol, ou constate que les granules s’acheminent lentement vers l’un ou l’autre pôle.
Une question capitale est de savoir si c’est là un phénomène comparable au transport des ions ou si c’est un fait de cataphorèse. Dans le premier cas les granules auront des charges propres, comme les ions; dans le second, ce seront des particules inertes, pourvues par le liquide d’une couche double et chargées par la lame qui les entoure immédiatement.
On admet généralement que le transport des granules est un cas de cataphorèse. Mais, en présence du fait que, dans de l’eau distillée aussi pure que possible, les uns descendent le courant tandis que les autres le remontent, il est permis d’en douter. Si les granules n’ont pas de charges propres, ces différences ne pourraient s’expliquer que par de faibles quantités d’ions + ou — qui se trouveraient unies à eux à titre d’impuretés. La preuve qu’il en est ainsi reste à faire8. Si les déplacements des granules sous l’action du courant ne sont pas dus à de telles impuretés, il faut bien qu’ils aient des charges propres, car des particules sans charges propres et rigoureusement insolubles, chargées par le petit nombre d’ions libres fournis par la très faible dissociation de l’eau distillée, se porteraient toujours vers la catode, entraînés par la lame adhérente d’ions H de leur couche double9.
Le fait que les granules, suspendus dans un même véhicule, l’eau distillée, se portent les uns vers l’anode les autres vers la catode autorise à conclure qu’ils ont des charges propres comme les ions et sont les uns positifs, les autres négatifs. C’est là un point d’importance capitale pour le biologiste, car il permet de concevoir la présence dans un même liquide intergranulaire d’ions de différentes natures ayant des charges différentes.
Mais dans un sol contenant une seule sorte de granules, ceux-ci ont tous une charge de même signe, et c’est là une différence capitale avec les solutions électrolytiques oû les ions sont toujours de deux sortes portant des charges égales et contraires.
Voici une liste des granules positifs et négatifs.
Positifs: Hydrates de fer, de cadmium, d’aluminium, de chrome, de cérium de thorium, de zircoi; acide titanique; oxyhémoglobine; rouge de Magdala, violet et bleu de méthyle; mucine.
Négatifs: Or, argent, platine, iridium, palladium, cadmium, sélénium, tellure, soufre; acides silicique, stannique, molybdique, tungstique, vanadique; sulfures, chlorures, iodures et bromures colloïdaux; ferrocyanures de fer, de zinc, de cuivre; indigo, bleu d’aniline, vert de méthylamine, fuchsine, aureosine; gélatine, albumine.
Mais, proportionnellement à leur masse, leurs charges sont incomparablement plus faibles que celles des ions: le nombre d’électrons que porte un granule est faible en comparaison de celui de la couche double dont il peut être entouré, en sorte que celle-ci peut diminuer sa charge, la neutraliser ou la faire changer de signe.
Coagulation de colloïdes. — Dans certaines conditions les granules d’un sol se rassemblent, se fusionnent en masses volumineuses qui se précipitent: c’est la coagulation. L’état de suspension ou de coagulation dépend de trois facteurs: la viscosité du liquide, la tension superficielle au contact des granules et du liquide, et la charge électrique des granules.
Viscosité. — En raison de l’extrême division de la matière dans les granules, la surface de ceux-ci est énorme par rapport à leur volume: un vingtième de milligramme d’or colloïdal présente une surface de 625 mètres carrés; pour l’albumine, dont les granules sont beaucoup plus gros, les granules d’un centimètre cube d’une solution à 1% présentent, pour un poids d’à peine 2 centigrammes, une surface de 60 mètres carrés. La force qui tend à les précipiter, par suite de leur densité supérieure à celle du liquide périgranulaire, est donc si faible et la résistance due à la viscosité du liquide si énorme qu’ils restent indéfiniment en suspension. Ce n’est qu’après leui réunion en un coagulum de même poids et de surface beaucoup moindre qu’ils peuvent se précipiter.
Tension superficielle. — Pour saisir comment la tension superficielle peut intervenir dans la coagulation, il faut bien comprendre la nature de cette tension.
Dans une masse liquide au repos, à surface plane, toutes les molécules se pressent les unes contre les autres en vertu d’une force attractive qui est la cohésion. Cette cohésion, énergique à distance très faible, n’a, autour de chaque molécule, qu’une sphère d’action très petite, d’environ, 0μ,1 de diamètre. Au sein de la masse, chaque molécule est attirée également en tous sens par ses voisines, en sorte qu’elle n’a aucune tendance à se déplacer. Mais les molecules situées dans la couche superficielle, de 0μ,1 d’épaisseur, sont attirées en bas par les sous-jacentes, tandis qu’il n’y a au dessus d’elles que peu ou point de molécules pour les attirer en haut, en sorte que la résultante les attire vers la profondeur du liquide. D’ailleurs elles ne peuvent y pénétrer, toute la place étant occupé par des molécules identiques à elles, et cette résultante n’a d’autre effet que de comprimer le liquide sous-jacent. Cette compression, dite pression normale K a été évaluée, par des calculs ayant pour point de départ des hypothèses un peu incertaines, à un chiffre énorme: 10700 atm. pour l’eau. C’est pour chaque liquide une constante physique.
Dans cette même couche superficielle, les composantes horizontales de la cohésion produisent une compression tangentielle des molécules les unes contre les autres, et il faut exercer un certain effort pour les séparer, dépenser un certain travail pour produire un certain accroissement de la surface, Cette résistance de la couche superficielle à la séparation de ses éléments constitue la tension superficielle, . Comme K, est une constante physique dépendant seulement de la nature de liquide. On a convenu de lui donner pour mesure la force nécessaire pour rompre la couche superficielle sur 1 millimétré de longueur. Cette force, très faible, a été mesurés expérimentalement: elle est pour l’eau de milligr. 7,7, notablement plus forte pour le mercure (47 milligr.), sensiblement plus faible pour les autres liquides.
Si la surface liquide est terminée par une surface courbe, la pression normale change: si la surface est convexe (ménisque couvexe, goutte), elle augmente; si elle est concave (ménisque concave) elle diminue. Sa valeur est déterminée par la formule
ou et sont les rayon de plus grande et de plus faible courbure. Pour une surface plane ou , , ce que nous savions par définition; pour une surface sphérique, et . Pour les surfaces concaves, est compté négatif. On voit que dépend de , mais et en sont indépendants: ce sont des constantes dépendant seulement de la nature du liquide et de son état physique.
La force nécessaire pour vaincre la résistance de la couche superficielle, le travail nécessaire pour augmenter sa surface d’une quantité donnée, sont indépendants de sa courbure.
La couche superficielle a été comparée à une membrane de caoutchouc tendue qui, par sa tension, exerce la pression sur le liquide sous-jacent. Cette comparaison n’est pas tout à fait juste, car dans le cas d’une surface plane, la membrane de caoutchouc n’exercerait aucune pression sur le liquide sous-jacent; d’autre part, sur une surface convexe, la membrane élastique tendue tend, quand on la fend sur une certaine longueur, à écarter les bords de la fente, tandis que la couche superficielle du liquide tend à refermer la fente.
Nous avons parlé jusqu’ici de liquides en rapport par leur surface avec l’air. Si deux liquides insolubles l’un dans l’autre sont en contact, la tension superficielle de la surface de contact n’est pas égale à la différence des tensions superficielles des deux liquides au contact de l’air: elle est moindre que cette différence. La relation est très individuelle et nullement simple: ainsi, bien que soit plus fort au contact de l’air pour l’eau que pour l’alcool, la tension du mercure est plus faible au contact de l’alcool que au contact de l’eau.
Les granules dans les hydrosols se comportent sous certains rapports, et en particulier au point de vue qui nous intéresse, comme les gouttes liquides, que nous venons d’étudier: comme elles, ils peuvent se fusionner en masses plus grosses; comme pour elles, il existe une tension superficielle au contact entre leur surface et le liquide intergranulaire.
La tension superficielle étant, en somme, une expression de la cohésion, il va de soi que, par son action, les granules doivent tendre à se fusionner toutes les fois que le mouvement brownien les amene au contact, et cela, d’autant plus énergiquement que la tension (ou cohésion) est plus forte. Sa tendance à reduire au minimum la surface libre est satisfaite par la coagulation, puisque le coagulum a une surface moindre que les granules qui l’ont formé. La tension superficielle est donc un facteur positif de la réunion des granules, c’est-à-dire de la coagulation. Même, si faible que soit sa valeur, elle devrait toujours produire cette coagulation, si elle n’en était empêchée par les facteurs négatifs de la coagulation, viscosité et surtout charges électriques, qu’elle ne peut vaincre que lorsqu’elle a une valeur suffisante.
Charges des granules. - Les granules d’une même substance ayant tous, dans le même liquide intergranulaire, des charges de même signe, se repoussent. Les charges sont donc un facteur négatif de coagulation ou un facteur positif de stabilisation.
En outre ces charges stabilisent le colloïde en diminuant la tension superficielle. On sait en effet, par la célèbre expérience de Lippmann, que la tension au contact de deux substances et maxima quand leur différence de potentiel est minima, et inversement. La chose est facile à objectiver. La tension superficielle d’un granule ayant une grandeur donnée, si sa surface vient à donner asile à un certain nombre d’électrons de même signe, ceux-ci se repousseront tangentiellement et diminueront d’autant l’attraction tangentielle qui constitue la tension superficielle. La chose reste vraie, qu’il s’agisse des charges appartenant en propre au granule, ou des charges d’une couche double, les deux lames de cette dernière contribuant ensemble au résultat.
Influence des électrolytes. — Si le liquide intergranulaire au lieu d’être de l’eau pure est additionné d’électrolytes ceux-ci vont d’abord modifier la tension superficielle de contact entre les granules et le liquide. Augmentant la tension du liquide ils vont diminuer la tension de contact et par là stabiliser la solution. Mais, en outre, ils vont fournir des ions qui, par leurs charges, vont influencer les granules. Quelle sera la nature de cette influence.
Les ions de même signe, quelle que soit leur nature ou leur valence n’en auront aucune: ils sont d’ailleurs tenus éloignés des granules par le signe de leur charge.
Les ions de signe opposé sont au contraire attires vers les granules et diminuent plus ou moins leurs charges: ils sont donc agents positifs de coagulation. Mais leur influence varie beaucoup suivant leur nature et leur valence.
Les ions monovalents autres que H ou OH ont l’action minima; les ions H et OH ont une action très puissante; les ions divalents sont beaucoup plus actifs que les monovalents ordinaires, plus actifs même que H et OH; les ions trivalents sont beaucoup plus actifs encore que les divalent. Pour coaguler un même hydrosol, s’il faut une quantité A d’ions monovalents, il faut 30 fois moins d’ions divalents et 1000 fois moins d’ions trivalents; les ions H et OH se placent pour l’activité entre les monovalents ordinaires et les divalents, mais beaucoup plus près de ceux-ci que de ceux-là10.
Après les indication données sur la vitesse des ions, leur taille et sur les phénomènes de la couche double, tout cela se comprend aisément.
A un hydrosol, on ajoute un électrolyte à ions monovalent, Na Cl par exemple. Les différences de vitessse et par suite de taille entre les ions monovalents autres que H et OH sont trop faibles pour intervenir, en sorte que ceux qui s’approchent le plus du granule sont ceux de signe contraire en raison de l’attraction électrostatique. Dans l’exemple cite, ce seront les Na+ si le colloïde est négatif, les Cl— s’il est positif. Dans les deux cas le résultat sera le même: la charge des granules sera diminuée; si les ions sont assez nombreux, elle sera assez abaissée pour que, sous l’influence de la tension superficielle, les granules se fusionnent et que la coagulation se produise. Il y a entre la tension superficielle, facteur de coagulation, et les charges des granules, facteur de stabilisation, une lutte. Tant que ce dernier est plus fort, le système colloïde reste à l’état de sol; quand il est suffisamment diminué par les ions pour perdre sa supériorité, la coagulation se produit. L’idée que le résultat est bien dû aux ions de signe contraire est démontrée par le fait que ces ions, et non ceux de même signe, sont entraînés par le coagulum d’où on ne peut que très difficilement les extraire par lavage; et souvent, alors, le coagulum se redissout.
Quand l’électrolyte est un acide ou un alcali, l’action de l’ion H ou OH devient tellement prédominante sur celle de l’autre ion, en raison de sa petitesse, comme dans le phénomène de la couche double, que ce dernier n’a pas d’influence; aussi, un acide ne coagule-t-il pas un colloïde +, malgré la présence d’ions — dans la liqueur; de même un alcali ne précipite pas un colloïde négatif. Par contre les acides coagulent énergiquement les colloïdes négatifs et les alcalis les positifs, parce qu’en raison de leur petitesse, ils s’approchent plus près de la surface des granules, et les déchargent d’autant mieux.
On comprend sans plus ample explication que les ions di- et trivalents soient plus actifs que les monovalents, mais on comprend moins bien que leur action ne soit pas seulement double ou triple de celle des ions monovalents, puis qu’ils ont seulement 2 ou 3 charges. Point n’est besoin non plus d’expliquer pourquoi, mélangés en proportions convenables, deux colloïdes de signe contraire se précipitent, mutuellement. Les deux colloïdes prennent part au précipité.
Si l’on ajoute une quantité insuffisante de l’un des deux, la précipitation est partielle et proportionnée; et le phénomène est réversible, en ce sens que l’addition d’un excès du colloïde qui est en proportion plus grande que celle correspondant à la précipitation totale, détermine souvent la redissolution partielle du coagulum, et que l’état final est le même que si l’on avait, d’emblée, mélangé les doses finales des deux colloïdes.
Placés dans des conditions semblables, les divers colloïdes ne précipitent pas avec la même facilité et l’on distingue, en outre des petites variations individuelles, deux grandes catégories: les colloïdes instables que coagulent des proportions très faibles, des traces, d’électrolytes et les colloïdes stables (stabilité toute relative) qui réclament des proportions beaucoup plus fortes (10 ou 15 % et plus). Ces derniers sont tous des colloïdes fournis par des êtres vivants (gommes, peptones, albumines); ce sont donc ceux qui interressent le plus le biologiste. Ils présentent la particularité d’ètre formés de granules relativement très gros et probablement très riches en eau: il en est ainsi, en effet, de leur coagulum, qui se déssèche et se réimbibe facilement, et il est permis de penser que cette propriété appartient à leurs granules mêmes, d’où le nom de colloïdes hydrophiles que Perrin propose pour le désigner.
Cette haute teneur en eau rend compte de leur stabilité, car, si la solution électrolytique précipitante les pénètre, elle diminue l’hétérogénéité du système formé par les granules et le solvant.
Le mélange d’un colloïde stable, même en quantité très faible, à un colloïde instable stabilise ce dernier, mais l’inverse n’est pas vrai.
Ces colloïdes stables forment, à beaucoup d’égards, une famille très distincte des autres colloïdes, par la grosseur de leurs granules, leur forte teneur en eau, leur stabilité, leur origine organique, le fait que leur coagulum est toujours redissoluble dans un excès de solvant; ils ont pour la biologiste un intérêt tout particulier car ce sont eux, très probablement, qui forment le protoplasma.
Applications aux cellules et à la parthénogénèse. — Il y a longtemps que Altmann a observé, au microscope ordinaire, avec de forts grossissements et des colorants appropriés, que le cytoplasme était formé de myriades de granules (c’est le nom même qu’il leur donnait) nageant dans un liquide intergranulaire. N’y a-t-il pas dans ce fait, joint à celui que l’albumine et nombre de produits du protoplasma vivant sont des substances colloïdes, une raison suffisante d’admettre que le protoplasme des cellules est un système colloïdal? Bien avant Altmann, H. Fol avait émis l’idée que le protoplasme était formé de particules portant des charges électriques: la chose est à peu près démontrée aujourd’hui. En effet, plus récemment, (1903) Lillie a montré que les particules formées principalement de chromatine, c’est-à-dire riches en acide nucléique (spermatozoïdes, leucocytes à gros noyau) se portent vers l’anode et sont par conséquent négatives, tandis que le cytoplasme, (cellules de Sertoli riches en cytoplasme, leucocytes à petit noyau) va vers la cathode et est par conséquent positif. Le phénomène ne peut guère être attribué à la présence d’électrolytes concomitants, car le véhicule était l’eau pure rendue isotonique par du sucre.
On est donc fondé à considérer le protoplasme comme formé de granules colloïdaux de natures diverses (et pourant par suite présenter des charges diverses comme grandeur et comme signe), nageant dans un liquide intergranulaire formé d’eau tenant en dissolution une petite quantité de substances albumineuses et d’électrolytes.
Ce n’est pas avec des données aussi vagues que l’on peut avoir la prétention d’expliquer toute la physiologie de la cellule par les propriétés des colloïdes, mais on entrevoit déjà quelques aperçus très suggestifs.
Et d’abord, la structure physique de la cellule, c’est-à-dire la disposition réciproque et la forme des parties qu’elle contient se conçoit comme réglée par leurs tensions superficielles et par des attractions et des répulsions qu’elles subissent du fait de leurs charges, différentes comme grandeur et comme signe.
L’instabilité qui est le propre de la substance vivante suggère l’idée que les facteurs de stabilisation et de coagulation se font à peu près équilibre dans la cellule, en sorte que la moindre variation dans les conditions physico-chimiques des parties intégrantes on du milieu ambiant peut donner le pas aux uns sur les autres ou inversement.
Or les phénomènes de la division cellulaire se ramènent presque tous à des déplacements de particules (sur lesquels nous reviendrons dans un instant) et à des dissolutions (résolutions en granules) et coagulations alternatives.
A la dissolution on peut attribuer: la disparition de la membrane nucléaire, la rupture des anastomoses du réseau de linine qui permet la constitution du spirème, peut être le dédoublement du spirème et la division transversale en chromosomes si ces parties étaient unies par une substance plus stable, la disparition du fuseau, et enfin l’égrènement des chromosomes en microsomes au moment du retour à l’état de repos. A la coagulation on peut rapporter: l’augmentations de volume des microsomes qui précède leur réunion en spirème, la formation du spirème, l’apparition du ou des centrosomes, la formation des asters, puis, au moment du retour à l’état de repos, la reconstitution du spirème et celle du réseau achromatique. Il est à croire d’ailleurs que ces solutions et coagulations, partielles et alternatives, ne sont pas dues à des variations indépendantes de leurs facteurs, mais constituent un système lié par des relations intrinsèques telle que le déclanchement du phénomène initial suffit à déterminer l’évolution complète.
Dans un travail très suggestif sur L’interprétation bipolaire de la division karyocinétique (Ann. Museum Buenos Aires, XIII, 259-276, 1906), A. Gallardo a montré quel parti on pourrait tirer de la notion de la charge des particules chromatiques pour l’interprétation de la division cellulaire. Dans les nombreux essais faits antérieurement dans cette voie, on avait attribué des charges aux centrosomes, ou considéré ces derniers comme centres de forces d’une autre nature, comme la diffusion (Leduc), ce qui est naturellement suggéré par la distribution des lignes de force représentées par les radiations qui en émanent, mais on n’avait pas songé à attribuer une charge de signe au contraire aux chromosomes et aux centrosomes. En ce faisant, Gallardo a considérablement éclairci la question et expliqué le spectre karyocinétique dans ses moindres particularités. Les chromosomes, en tant que formés de granules acidophiles et conformément aux observations de Lillie, seraient électro-négatifs, les centrosomes, en tant que partie intégrante du cytoplasme seraient, contrairement à la conception de Lillie, électro positifs, et dès lors il devient tout naturel qu’ils se repoussent et attirent les chromosomes, suivant des lignes de force dont les filaments du fuseau sont la représentation plus ou moins grossièrement matérialisée par l’orientation des particules les plus conductrices du cytoplasme interposé. Les lignes équipotentielles, normales aux lignes de force, se montrent, dans ces conditions, nettement parallèles au contour des coupes optiques de la cellule aux diverses phases de la division. La forme en bisscuit, bien connue, trouve une explication particulière dans l’augmentation de tension superficielle à l’équateur de la cellule, corrélative d’une chute du potentiel dans cette région, par suite du recul des deux demi noyaux vers les pôles.
Dans un mélange de colloïdes de signe différent, les granules ne se comportent pas individuellement selon le signe de leur charge: ils se portent tous ensemble vers le même pôle, vers l’anode si les négatifs sont en excès, vers la catode dans le cas contraire. Un tel mélange peut donc être électriquement neutre et devenir positif ou négatif à la suite de faibles variations dans la proportions des colloïdes constituants. Il y a là une nouvelle condition d’instabilité. On conçoit aisément qu’une cellule au repos puisse avoir un noyau positif par sa chromatine et un cytoplasme neutre, en sorte qu’elle est unipolaire. Une faible variation dans les constituants du cytoplasme peut rendre ce dernier électropositif et établir la bipolarité, condition de la division.
J’ai fait remarquer, il y a bien longtemps, que, à la base de toute division indirecte, se trouvent des phénomènes essentiels de division directe: c’est par division directe que le centrosome se scinde et que le spireme ou les chromosomes subissent la division longitudinale. Une intéressante suggestion de Perrin jette une certaine lumière sur ces phénomènes obscurs. Imaginons une particule extrêmement petite qui grossit peu à peu dans un milieu nutritif. Tant qu’elle n’a pas atteint une taille suffisante, elle ne peut recevoir aucune charge, la charge minima de l’électron correspondant, en raison de la densité électrique moyenne, à une surface donnée. Après avoir reçu cette charge, la particule continue à grandir et il arrive un moment où elle reçoit 2 électrons: ceux-ci étant de même signe se repoussent et déterminent la scission de la particule en deux autres, qui recommencent à grandir jusqu’à ce que le phénomène se reproduise. Ainsi peut s’expliquer la multiplication des granules sous une taille minima tant que n’intervient aucun phénomène de coagulation partielle.
Ce raisonnement peut s’appliquer aux microsomes constitutifs des chromosomes ou du spirème et au centrosome. Ainsi s’expliquerait la division, à un moment donné, du centrosome en deux autres qui se repoussent, et la division longitudinale des chromosomes dont les deux moitiés s’écartent vers le pôles sons la double influence de leur répulsion et de l’attraction des centrosomes, dont les charges sont de signe contraire à la leur.
La condition essentielle de la division cellulaire est donc une bipolarité reposant sur les charges de signe contraire du centrosome et de la masse chromatique.
L’œuf mûr, étant privé d’ovocentre, n’a qu’une polarité et c’est pour cela qu’il ne peut se diviser. La fécondation a pour effet de lui procurer: 1° une masse de chromatine paternelle (non nécessaire à son évolution mais utile pour communiquer au produit les avantages d’une double lignée ancestrale); 2° un centrosome qui est ou pourvu d’une charge de signe contraire ou apte à recevoir une telle charge du cytoplasma ambiant. L’oeuf fécondé a donc cette double polarité qui lui permet d’effectuer la série de divisions successives qui constituent la segmentation.
Dès lors l’action des agents de la parthénogenèse expérimentale devient claire: elle consiste à communiquer à l’oeuf vierge cette seconde polarité qui lui manque. Les solutions électrolytiques qui constituent essentiellement ces agents doivent avoir pour effet, de donner une charge soit au cytoplasme, surtout s’il est dans cette condition neutre instable sur laquelle nous attirions l’attention il n’y a qu’un instant, soit plutôt à quelque élément du cytoplasme apte, de par sa constitution physico-chimique, à la recevoir, et à faire de lui le centrosome. Les nombreux asters qui apparaissent dans le cytoplasme ayant la première division sont un indice de cette action. Dès lors s’explique dans une certaine mesure ce fait contradictoire de l’universalité d’action des électrolytes et de l’action prépondérante de certains d’entre eux11.
Il y a loin de ces vagues indications à une explication complète et précise des phénomène. L’étude de ces questions n’est pas assez avancée pour qu’il soit prudent de tenter encore autre chose. Nous en savons juste assez pour comprendre que c’est là une conception fertile et qu’il y a lieu de travailler dans cette direction.
- Station Zoologique de Roscoff (Finistère).
Professeur à l’Université de Paris. |
Note
- ↑ Il n’en est plus de même depuis que j’ai découvert un procédé de traitement par le tannin et l’ammoniaque qui donne des résultats très supérieurs à tous ceux antérieurement connus.
- ↑ Cette condition n’est plus nécessaire depuis que j’ai découvert le procédé au tannin et à l’ammoniaque.
- ↑ Récemment, Flusin (Thèse de Doctorat de Paris) a montré comment la théorie de l’imbibition satisfait à la plupart des exigences de la question.
- ↑ Cette formule est intéressante à divers titres:
Elle rend compte du fait que le dissociation augmente quand on augmente la dilution, car on voit que si diminue, doit devenir plus grand.
Elle explique ce fait que, si à un électrolyte on en ajonte un autre qui ait un ion commun avec lui, si cet ion est à une concentration moindre dans le second, le dissociation augmente dans le premier, car ce sera comme si on ajontait de l’eau. Ce sera l’inverse si la concentration est plus forte. Il n’y a pas de changement si la concentration est égale, auquel cas les deux solutions sont dites isohydriques. Comme corollaire, si à une solution on ajoute un corps ayant un ion commun, mais à l’état solide, la concentration de cet ion augmente forcément et un certain nombre d’ions se réassocient en molécules, ce qui, ainsi que nous le verrons plus loin, a pour effet de diminuer la propriété afférente à cet ion. Ainsi, en ajoutant à une solution d’acide acétique un acétate solide, on diminue l’acidité de la solution.
- ↑ On dit, d’ordinaire, que la dissociation est moins forte que celle qu’indique la formule. Elle est moins forte pour les concentrations moins élevées que celle ou , plus forte pour les autres. La formule donne pour une série de valeurs qui vont en croissant avec et il n’y a aucune raison de choisir celle qui correspond à si ce n’est que le calcul est plus aisé dans ce cas. Ces valeurs de , très différentes pour les concentrations élevées, tendent vers une limite fixe pour les grandes dilutions. C’est cette valeur limite qu’il faudrait prendre, et dire alors que la formule donne pour des valeurs trop faibles.
- ↑ J’y ai réussi depuis.
- ↑ Dans de récentes expériences j’ai montré que, au moins chez les Astéries, la présence de l’oxygène était non seulement inutile, mais gênante, en sorte que les résultats sont notablement améliorés quand on le chasse complètement. Chez les Oursins je n’ai pas obtenu de résultats aussi probants, mais j’ai, par mon nouveau procédé au tannin et à l’ammoniaque en solution isotonique à l’eau de mer, obtenu des blastules nageantes après avoir extrait l’oxygène du réactif par la vide, aussi bien que possible et sans doute à peu près complètement.
- ↑ Tout au moins en ce que concerne les colloïdes du protoplasma, il se pourrait qu’ils dussent leur charge à des ions H ou OH présents dans le granule, non à titre d’impureté, mais appartenent à des substances faiblement acides ou alcalines, faisant partie de la constitution chimique du granule.
- ↑ Si des parcelles de verre se meuvent vers l’anode, si dans un tube de verre l’eau se rend vers la catode, c’est parce que le verre se dissout lentement en émettant des ions.
- ↑ Si on emploie un mélange d’électrolytes, les ions monovalents ajoutent leur actions; mais s’il y a un ion monovalent et un ion divalent, l’action du premier semble plutôt se retrancher de celle du dernier: en tout cas, elle la diminue.
- ↑ Les recherches que j’ai entreprises après avoir écrit ces lignes, expressément pour vérifier les idées qu’elles expriment, leur apportent une remarquable confirmation. En traitant les œufs vierges d’Oursins, même en solution isotonique à l’eau de mer, par un réactif coagulant, le tannin, puis par un stabilisant du protoplasme, l’ammoniaque, j’obtiens des résultats incomparablement plus complets et plus constants que par n’importe quel autre procédé.
- Testi in cui è citato Gary Nathan Calkins
- Testi in cui è citato James Bertram Overton
- Testi in cui è citato David Fisher Day
- Testi in cui è citato Georg Albrecht Klebs
- Testi in cui è citato Johannes Dewitz
- Testi in cui è citato Jean-Eugène Bataillon
- Testi in cui è citato Lucie Rondeau-Luzeau
- Testi in cui è citato Jacques Loeb
- Testi in cui è citato Aleksandr Tichomirov
- Testi in cui è citato Kazimierz Kostanecki
- Testi in cui è citato George Lefevre
- Testi in cui è citato Martin Fischer
- Testi in cui è citato Hugh Neilson
- Testi in cui è citato Georges Bullot
- Testi in cui è citato Arthur White Greeley
- Testi in cui è citato Yves Delage
- Testi in cui è citato Thomas Hunt Morgan
- Testi in cui è citato Edmund Beecher Wilson
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