Pagina:Baretti - Prefazioni e polemiche.djvu/293

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peu les lèvres. Les «a» des anglais sont pour la plupart des «e» chez nous et chez vous. Leurs «e» sont souvent des «i» á notre manière et á la vótre, sans compier ceux qu’ils ne prononcent presque pas, comme dans les mots: «tongue, open, rotteti, taken, garden, metre, lucre, metile, mmitle, thistle», etc. Dans la conversation rapide, on a quelque peine á distinguer certains de leurs mots de certains autres: entre le nom, par exemple, de la mère des amours et de la ville de Venise: «Venus» et «Vertice». Leurs fréquentes aspirations et leur lettre dentale «th» contribuent aussi á obscurcir et á affaiblir le son de leurs mots, et leurs musiciens ne sauraient s’en assister pour rendre leur chant mélodieux. Pourquoi appellera-t-on toutes ces choseslá «de la masculinité»? Ne vaudrait-il pas mieux les appeler par leur nom véritable, qui est «de l’obscurité» ou bien «de r antimusical»?

Ce sont donc nos voN’elles rondement prononcées, qui donnent tant de jeu á nos chanteurs et qui rendent notre musique vocale plus sonore que la vótre et que celle des anglais. Mais parce que nous pronongons nos voyelles d’un ton clair et net, et parce que notre chant remplit mieux vai g^and théátre, vous en tirerez l’absurde conséquence que vos langues sont masculines et que la nòtre est féminine ! Que ne concluez-vous de méme que le son de la trompette est plus féminin ou efféminé que celui du hautbois ou du violoncelle? En véritè, vous autres messieurs de France et d’Angleterre, vous ètes bien habiles quand il s’agit de vous donner raison á vous-mémesl La plupart d’entre vous décide hautement du son de notre langue sans en savoir prononcer quatre mots avec justesse, sur la foi de vos oreilles accoutumées dès l’enfance á d’autres sons, ou bien sur la foi de certaines gens qui, de notoriété publique, n’ont point su l’italien ou ne le savent point. Voilá des juges bien compétents et bien respectables ! Mais n’ayez pas peur, messieurs, d’ètre les seuls ridicules á l’égard des louanges que vous donnez, chacun de votre coté, á vos langues respectives aux dépens de la nòtre ! Nous avons chez nous bien des bouriques á deux jambes, qui, sans savoir quatre mots de francjais ou trois d’ anglais, vous