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la vérité, savoir mauvais gré ni à Tyndall, ni à Joule, de n’avoir pas connu, sur l’équivalent mécanique de la chaleur, le mémoire posthume da Sadi Carnot qui n’a été mis au jour que beaucoup plus tard, et qui, s’il eût paru du temps de Carnot, eût assuré à ce grand homme l’honneur d’avoir fondé seul la thermodynamique entière.

Mais qu’ils ne citent pas son nom parmi les fondateurs de la science nouvelle, c’est ce qui est à peine compréhensible; Joule ne peut être suspect d’ignorer ce qui s’est publié en France: au plaidoyer de Tyndall en faveur de Mayer, il oppose de longues citations de l’ouvrage du français Marc Seguin, publié en 1839, sur «l’influence des chemins de fer», et il conclut, non sans quelque injustice dans le partage des mérites, que «si Rumford, Seguin et Mayer, doivent être regardés comme les précurseurs de la doctrine nouvelle», la doctrine elle-même est l’œuvre collective de lui, Joule, et ensuite «de MM. Thomson, Rankine, Helmholtz, Hortsmann, Clausius et autres».

En 1867, Paul Desains, l’auteur des premières expériences précises sur le spectre infrarouge, rédigeait, à l’occasion de l’exposition universelle, un «Rapport sur les progrès de la science de la chaleur depuis le début du siècle»; et ne citait même pas le nom de Carnot.

Plus tard, en 1879, Berthelot, dans son essai de mécanique chimique, donnera encore une énumération des fondateurs de la thermodynamique tout à fait analogue à celle de Joule, et où le nom de Carnot ne figure pas.

Mais revenons à l’époque de Tyndall. En 1867, paraît une traduction française, due toujours à l’abbé Moigno, d’un autre ouvrage de vulgarisation anglais: la Corrélation des forces physiques, de Grove. Et la traduction paraît, complétée par des notes de «M. Seguin aîné», c’est-à-dire du même Marc Seguin, neveu de Montgolfier, dont le livre «de l’influence des chemins de fer» était longuement cité par Joule.

Grove, — avec des idées métaphysiques fort différentes de Tyndall — professe, presque dans les mêmes termes, les mêmes doctrines sur la «conservation de la force», avec la même absence des réserves nécessaires. Il ne cite Carnot que pour indiquer en quoi Seguin, dès 1839, l’a combattu, d’ailleurs justement: Seguin se refusait à admettre que, dans la locomotive, la chaleur de la chaudière fût rendue à l’air qui tient