[p. 205 modifica]INTRODUCTION
Dans un de ces papiers joumaliers qu’on public à Londres,
j’ai lu, il n’y a pas longtemps, l’anecdota salvante.
Une dame anglaise très respectable à tous égards, étant à
Paris, entendit lire une lettre récemment écrite par monsieur
de Voltaire à un de ses amis. Dans cette lettre un homme
nommé Letoumeur, secrétaire de librairie, est appelé «impudent»,
«imbécile», «faquin» et «maraud», parce qu’il a traduit en
fran^ais les oeuvres de Shakespeare dans l’intention de les
imprimer ainsi traduites par souscription.
Non content de traiter ce pauvre traducteur avec si peu de
cérémonie, monsieur de Voltaire se jette dans cette lettre sur
son originai et dit, entre autres choses, que les oeuvres de
Shakespeare ne sont qu ’ un •«enorme fumier».
A ce mot de «fumier», la dame s’écria que «ce fumier
avait fertilisé une terre bien ingrate».
Cette remarque serait un ben mot fort heureux, si elle ne
portait point à faux: c’est-à-dire s’il était bien avere que monsieur
de Voltaire sait assez la langfue anglaise pour avoir pu
lire les oeuvres de Shakespeare au profit de ses tragédies. Je
m’en vais faire voir qu’on lui fait trop d’honneur par cette
supposition.