Il Baretti - Anno II, n. 10/Synthése du Snobisme

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Jean de Menasce

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Il Parnaso e Verlaine Del teatro italiano

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Synthèse du Snobisme.

(Esquisses)

Ecarter les snobs et leurs divers snobismes et leurs diverses définitions du snobisme, pour ne considèrer que la chose même. Ce n’est pas là trover un élément commun à tous et plus grand commun dénominateur, mais une essence qu'aucun ne réalise parfaitement, et qui n’en est pas moins ce que nous cherchons, du moment que nous parvenons à le bien isoler.

Dèpouiller le snobisme de toutes les autres essences, qui ne lui sont pas équivalentes, encore quelles puissent dans la pratique n’être jamais sèparées de lui. Notre critèrium est le fait que la plupart de ces essences, avec lesquelles on confond d’ordinaire le snobisme, portent un nom distinct. (Arrivisme, ambition, dèdain, arrogance).

Nègligeons les motifs qu’a le snob de devenir tel et ne le considérons que tout formè: le snobisme en action. Il me parait impliquer un groupe, ou société, et un individu en face de ce groupe, qui s’applique à en connaitre la nature intime et jouit de celle connaisance.

Ce groupe ne sourait être une association, mais une véritable société dont le lien est, non pas une idèe abstraite, ou une volonté, ou une organisation, mais simplement une manière d’être, c’est à dire une essence.

L’être exclut le connaitre. L’individu qui connait l'essence de son propre groupe et jouit de celle connaisance ne saurait être dit snob, mais simplement curieux, et la gratuitè de son attitude lui est reprochèe comme une anomalie morbide.

Il faut donc que le snob n’appartienne pas au groupe de la connaisance duquel il jouit. Et cependant, pour parvenir à le connaitre dans son essence et plus qu’exterieurement, il lui faut pourtont lui appartenir. Cette contradiction ne doit point nous effrayer, puìsqu’elle n’est opérante qu’à l’ètat lìmite on ètat pur, dont nous ne savons pas s’il existe véritablement. (Car la question de l’existence ne nous intèresse pas).

Le signe de cette oppartenance est l'admission méme du snob dans le groupe; ses membres la lui accordent en tant qu’ils reconnoissent que le snob participe de leur essence; et ce jugement est en principe infaillible: il est intuitif et non discursif, et le seul moyen par lequel un homme reconnait son semblable.

Et qu’on n’objecte pas que l’admission du snob est prècisèment un cas de la faillibllitè de cette intuition. Pour être infaillible, cette intuition d’admission n’en est pas moins conditionelle, c’est à dire jusqu’à preuve du contraire. Une fois admis dans le groupe, (en vertu de cette intuition qui le définit, et est à la fois son mode d’expression et de dèfence), c’est ou snob à faire la preuve, le plus souvent négative, qu'il «en est» bien.

Il la peut faire en s’appliquant à vivre de la vie propre au groupe, pour autant quelle ne limite point son activité de connaissance. C’est dire qu'il doit s’abstenir d’agir, sans pour cela professer d’ètre spectateur. Car sitǒt qu’il agit et s’identifie pleinement au groupe, il cesse de le connaitre, et sitǒt qu'il s’en abstrait totalement, il cesse de le connaitre par le dedans et par l’intuition; partant, dans les deux cas d’ètre snob.

Il s’ensuit que, pour autant que le snob divulgue sa connaisance, son affront à la loi de dèfense du groupe l'en fait aussitǒt sortir. C’est donc à tort qu’on dit, de certains romanciers qui rendent publiques leurs intuitions, qu’il sont snob. Et inversement, on ne peut jamais surprendre le véritable snob, à l'ètat pur, en flagrant dèlit.

Condamné à demeurer sur la corde raide, et pourtant à se taire, le snob ne peut que connaitre la joie la plus rare et la plus pure. Elle ne lui saurait pourtant être èternelle, puisque la profondeur même de son intuition lui en limite la durèe. D’où vient que tant de vrais snobs finissent désabusès où quittent le snobisme pour la littérature.

Mais d’où vient que l'on prète au snob toujours un dèsir d'ascension! C’est que, véritable dépoysé, son premier acte est de chercher le groupe qui est sa patrie naturale. Le trouve-t-il, il s’aperçoit aussitǒt que son passé lui interdit d’y appartenir pleinement, et qu’il doit se contenter d’en jouir par la connaissance. Celle recherche préliminaire donne à croire qu’il est ambitieux, alors qu’il est essentiellement en quète de son semblable.

Le succès du snob dépend autant de sa dextérité à faire le dèpart de l’être et du connaitre, que de l’èlasticitè de l’intuition du groupe. Tel groupe n’admet que l'appartenance totale, tel autre commence déja à poser des distinctions. Plus la difficultè est grande, plus le snob est à même d’atteindre une intuition profonde d’une réalité d’ordre sociale - incommmunicable.

Ce silence imposé garantit au snobisme le caractère d’une oeuvre d’art vécue, et d’une sapience ineffable, dont la procession vers l’expression constituera la sociologie rationelle.

Jean de Menasce.