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admire et qu’on ne saurait estímer; tant de vices qu’on méprise et qu’on ne saurait détester! Falstaff est menteur, gourmand, paillard, voleur, poltron, bravache, fanfaron, flatteur et médisant. Malgré tout cela, on ne saurait le trouver haissable, parce qu’il a un fond de bonne humeur qui ne tarit jamais, et parce qu’il sait avoir de l’esprit plus que personne, sans jamais chercher á éclipser celui des autres. Oh, l’instructive peinture de ces hommes séduisants, si dangereux dans la société, á qui le monde pardonne si aisément une infinite de vices en faveur de l’allégresse qu’ils savent répandre partout oú ils se montrent!
Je ne finirais jamais si j’allais vous donner seulement des faibles crayons de ces admirables portraits que Shakespeare a su peindre d’une main hardie. Disons mieux. Je ne saurais le faire. Si le sieur Letourneur achève sa version, vous y verrez peut-étre, comme á travers un voile, quelque chose du savoirfaire du farceur anglais. Farceur Shakespeare ! ò blasphème poétique! Apprenez cette langue, messieurs les fran9ais! apprenez-la bien, vous dis-je, et ce seul farceur, ce seul histrion barbare, vous paiera très amplement de la peine ! Les caractères de Shakespeare sont bien autre chose que les x\lzires et les Zaires, que les Joyeuses et les D’Aumales, que la pauvre PoHtique et la mesquine Discorde du poète philosophe ! Ce serait en vérité comparer des jolies figures d’ ivoire aux Moíses et aux Davids de Michel-ange, que de comparer les gens de monsieur de Voltaire aux gens de Shakespeare. Shakespeare n’a point des Arundels et des Rosamores, méprisables avortons d’une imagination frénétique, mise en mouvement par cette baine nationale, que les coeurs petits et corrompus ne viennent jamais á bout de subjuguer. Mais laissons cela pour une autre fois, et reprenons le fil de notre histoire.
Que les frangais se plaisent donc aux trésors qu’ils possèdent, mais qu’ils n’aillent point, sur la foi d’un homme qui n’entend point l’anglais, mépriser les richesses de leurs voisins. J’admire leur théátre, je l’aime autant qu’eux. Peut-étre ai-je Corneille et Racine tout autant au bout de mes doigts que les a monsieur de Voltaire. Malgré cela, je dis que le monde