Pagina:Leopardi - Epistolario, Bollati Boringhieri, Torino 1998, II.djvu/808

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Mablin, que j’avais suppléé pendant 2 ans, mourut, et mon rivai, un homme presque ignorant et tout-à-fait obscur, M. de Bas, lui succeda. C’était-Ià un coup de foudre pour moi, et je n’en suis pas encore tout- à-fait remis. Heureusement que j’avais commencé l’édition nouvelle de S. Jean Chrysostome d’après Montfaucon, qui me faisait exister convenablement. Car dans ma position universitaire il n’y a pas un tó-ra de changé; je reste, et je mourrai probablement examinateur des livres classiques, avec 1000 fr. par an. Mais le Chrysostome m’inté- resse vivement. Je réserve pour mes jours de retraite l’élucubration d’un ouvrage curieux sur le siècle de Théodose. Après Chrysostome je publierai peut-ètre d’autres Pères, qui sait. Mais tout cet avenir dzcòv iv yóvaai xeucu. En attendant il faut bien que je trouve mieux d’ici à l’année prochaine. Au mois de Novembre 1836 le Chrysostome sera fini, et alors que ferai-je? Quoiqu’il arrive, je suis toujours très embar- rassé pour quitter Paris, à cause de ma grande bibliothèque, sans la- quelle je ne puis travailler, moi homme de savoir positif et historique, ne pouvant rien par moi-mème. De plus, à fur et mesure que je fais de tristes espériences dans ce pays, je m’y attaché davantage à des indi- vidus. Peut-ètre est-ce là le signe précurseur de la décadence de mes facultés. Mais je me trouve si heureux dans le cercle de mes élèves, que je crains de ne pas retrouver autre part ni la mème affection, ni le mème ardent désir de s’instruire chez moi. Il me semble quelque- fois que je suis un homme distingué. Je sais très bien que ce n’est là qu’une illusion. Mais j’ai peur de recommencer la carrière en Allema- gne, à mon age si positif de 35 ans. Là bas probablement je ne pour- rais plus m’illusionner du tout. lei j’ai le plaisir de mépriser les illu- sttations, et d’aimer et de pousser les petites gens. Que je vous conte t|uelques anecdotes sur nos illustrations. Cousin me fait revoir ses notes sur le xer volume de sa traduction de la Republique de Platon. Il passe un jour entier chez moi, écoutant en écolier docile mes observations, les adoptant toutes. Depuis ce jour le voilà mon ennemi à mort. Quand il s’est agi de me piacer, il n’a pas voulu de moi, prétextant que j’etais hon grammairien, mais que j’avais la malheureuse prétention d’entendre i|uelque chose à la philosophie de Platon. Si j’avais publié mon com- inentaire sur le Banquet, j’aurais reduit en poudre les absurdes notes de Cousin. Mais mon petit argument emprunté à Wolff et à Wytten- bach à suffi à son irascibilité. Quant à Boissonade un mal-entendu a suffi pour me brouiller avec lui. J’ai fait son article dans la nouvelle Encyclopédie de gens du monde.