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qui, en Amérique, a donné lieu à des publications très nombreuses, mouvement auquel sont attachés les noms de Yerkes, de G. H. Parker, de Turner, de Watson, de Porter, de Cole, de Berry........, et qui a laissé Morgan bien en arrière. Dans les pays germaniques, les uns ont nié purement et simplement la psychologie comparée, les autres, tout en méconnaissant les travaux des américains, ont eu la prétention d’indiquer la voie dans laquelle devait s’engager la nouvelle science; la tentative de Lukas, de Vienne, n’a pas été très heureuse; j’ai dit ce que je pensais de celle toute récente de O. Zur Strassen.

Le livre de Marguerite Washburn, en exposant d’une façon systématique les travaux récents des américains, répond à un desideratum et rendra de grands services à ceux qui veulent se mettre au courant des acquisitions nouvelles de la psychologie comparée. Ce livre est fait avec méthode, clarté, sagesse et impartialité; peut-être avec trop d’impartialité. C’est en Amérique que s’est ouvert le grand débat entre les partisans des idées de Jacques Loeb et les partisans des idées de Jennings; Jacques Loeb, sans hésitation, s’était placé sur un terrain ferme, celui du déterminisme physico-chimique des actes des animaux: Jennings a invoqué surtout le principe de la sélection, et s’était montré tout d’abord très intransigeant vis-à-vis des idées de Jacques Loeb, alors que sa théorie, loin de contredire celle-ci, pouvait se combiner avec elle, comme le darwinisme peut se combiner avec le lamarckisme; actuellement les idées géniales de Loeb sortent avec triomphe de la lutte; Torrey et moi-même l’avons montré, chacun de notre côté, tout récemment; or, j’aurais aimé que Miss Washburn se montre moins réservée à l’égard du grand conflit qui a partagé les psychologues des animaux inférieurs en deux camps; d’autres, certainement, lui sauront gré de sa timidité et de sa prudence.

Je crois cependant qu’on n’aurait fait aucun reproche à l’auteur de «The animal mind», si elle avait accordé une plus grande place à la discussion de la question des tropismes; ceux-ci viennent en fin de chapitre, et à propos du problème de l’orientation. Chez les animaux les plus inférieurs, on observe deux grandes tendances: celle de se placer dans la direction des forces du milieu extérieur (lumière, gravitation) qui agissent sur eux, et celle de tourner sur soi-même quand la force varie brusquement d’intensité; c’est là d’une part les «tropismes», d’autre part la «sensibilité différentielle»; ces deux notions suffisent en général pour expliquer les marches «capricieuses» des Infusoires, des Etoiles de mer, des Vers, des Mollusques.... C’est précisément ce qui ne ressort pas assez nettement du livre de Marguerite Washburn.