Pagina:Marino, Giambattista – Adone, Vol. I, 1975 – BEIC 1869702.djvu/35

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et en cette Idée, tout ce qui entre inutilement ou non nécessairement dans le Poëme, mais sans disconvenance neantmoins (ce qui peut estre beaucoup, attendu sa pauvreté naturelle), toutes ces choses, dis-je, sont estimées produire Diversité engendrée par les Accidens. La première Diversité fait la Fable nécessaire, la\t5 seconde la rend riche d’ornemens. La Merveille a les mesmes sources; la Nature du Suject produict le Merveilleux, lors que par un Enchaisnement de causes non forcées, ny appellées de dehors, on voit résulter des Evenemens, ou contre l’attente, ou contre l’ordinaire. La Merveille a lieu par les Accidens, quand la Fable est\t soustenuë par les Conceptions et par la richesse du langage seulement, de façon que le Lecteur laisse la matière, pour s’arrester à l’embellissement. Mais avant que d’amener ces choses à nostre propos, il faut supposer que l’examen de tout Poëme gist premier que tout en la cognoissance de son Suject, pour le rapporter à\t son Idée; puis à voir s’il a l’observation des réglés données à son Espece. L'Adonis donc, pour venir au fait, estant un Suject Nouveau, constituant une Espece nouvelle, opposée, comme nous avons dit, à l’Heroïque (à qui les premières maniérés de la Diver- sité et de la Merveille, qui partent de la Nature du Suject, appartiennent), entant que la Nature de son Idée nouvelle (qui est d’avoir plus d’Accidens que de Substance) ne reçoit pas ce premières, s’arreste aux dernieres qui sortent des accidens, dont il est tres-capable. Or il s’y arreste ainsi non pas qu’il n’y ayt et Di-\t versité et Merveille de ces premières especes, dans le Corps de la Fable, tant qu’elle l’a souiïert, mais d’autant qu'il est requis, pour la perfection de son estre, qu’il s’attache à la Partie que l’Heroïque n’a peu embrasser; et que comme l’un se soustient par ses seuls Evenemens, arrivez pendant la Guerre et le Trouble, de mesme l’autre se maintienne par le seul moyen des choses simples et vaines, que l'Action faicte durant la Tranquillité de la Paix luy fournit. Mais que nonobstant cela le Poëte n’ayt rien laissé en arriéré dans l'Adonis, de ce qui luy pouvoit accroistre et la Diversité et la Merveille qui procèdent de la Nature