Pagina:Marino, Giambattista – Adone, Vol. I, 1975 – BEIC 1869702.djvu/38

Da Wikisource.

générales que toute Epopée doit observer, est particulièrement la Principale, sans laquelle le Poëme n’est pas Poëme ains Romant. Si donc pour garder cette Unité le Poëte s’est contenu dans les bornes de la Fable proposée, bien que stérile de soy pour les pre5 mieres maniérés de Diversité et de Merveille, il n’a faict que ce qu’il devoit faire, et cherchant ces Diversité et Merveille dans les secondes, ça esté chose conforme à l’Idée de son Poëme nouveau. Que si vous me demandiez maintenant quelle des deux maniérés me semble la plus noble, ou celle qui vient de la Nature du io Suject, ou celle qui sort de ses Accidens seulement; c’est à dire, pour l’esclaircir par l’exemple, ou l’Heroïque qui a le Trouble essentiel, ou cette nouvelle Espece qui a la Tranquillité inséparable; j’avoiierai tout ingenuëment que c’est la première selon mon Sens, et que je ne mets celle-cy que seconde en ordre; encore 15\tque plusieurs raisons me peussent faire penser autrement. Car si entre autres vous considérez la Fable, il vous souviendra que les Anciens en ont recognu de trois sortes. La Première estoit appellée des Latins Motoria, comme celle qui contenoit en soy des agitations et de la confusion dans la suitte de son Suject, 20\tconduittes avec art à une fin ou heureuse ou malheureuse, selon que la Matière le desiroit. La Seconde se nommoit Stataria, comme moins agitée et plus tranquille que l’autre; et celle-cy consistoit en accidens ordinaires, et finissoit sans grand attirail, de la sorte que le Spectateur se l’estoit persuadé. La troisiesme se disoit 25\tMixte, comme celle qui tenoit de l’une et de l'autre. Or de dire quelles de ces trois Espèces estoit la plus en estime auprès d'eux il seroit difficile, et sembleroit aisément que la Tranquille ne leur fust pas en moindre considération que les autres, veu qu’ils la mettoient souvent en practique, et veu que l’institution de la 30\tPoésie fait plus pour elle que pour les deux autres; voicy comment. La fin de la Poësie estant l’Utilité, bien que procurée par le moyen du Plaisir, il y a de l’apparence que ce qui a l’Utilité pour object, c’est à dire ce qui tend a l’Utilité, soit plus estimable en icelle, que ce qui n’a pour object que le Plaisir seulement, c’est à dire ce qui se termine au Plaisir; et qu’ainsi les Fables qui ne sont pas emba-