Masaccio: Ricordo delle onoranze/Giorgio Lafenestre, A Masaccio

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Giorgio Lafenestre, A Masaccio

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Al lettore Camillo Benoit

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Di GIORGIO LAFENESTRE

membro dell’istituto di francia (accademia di belle arti)


À MASACCIO



Masaccio, bon garçon, adolescent robuste,
Bénis soient la maison, l’air léger, le beau val,
Où tu pris ton corps sain, ton coeur droit, ton oeil juste!

Lorsque la pauvreté, lorsque l’instinct fatal
Qui sous ton front précoce allumait le génie,
T’eurent fait déserter la paix du bourg natal,

Dans l’ardente Florence où l’on discute et nie,
Où fermente l’esprit par la lutte agité,
Ta candeur put, sans trouble, affronter l’ironie,

Et, librement tranquille en ton obscurìté,
Trop modeste ouvrier pour courtiser la gloire.
Tu marchas dans ton rêve avec simplicité.

Studieux, n’aimant point à quereller ni boire,
Ton travail achevé, dans l’atelier bavard,
C’est dehors, sur la place, aux marchés, à la foire,

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Que s’ouvrait, large et clair, ton oeil de campagnard,
L’oeil percant qui dépiste au loin l’oiseau dans l’herbe.
Et que la vie active enivrait ton regard.

Tel qu’un faucheur se hâte à botteler sa gerbe
Quand s’obscurcit la nue à l’occident vermeil,
Avant que s’abattit sur toi l’orage acerbe,

Tu buvais, à grands traits, l’extase du soleil,
Et le monde, sortant de ses brouillards funestes,
T’enchantait, comme Adam à son premier réveil;

Tu moissonnais gaiment couleurs, formes et gestes,
Pour les fixer ensuite aux chapelles d’azur,
Où les bons Saints, que modelaient tes pinceaux prestes,

Si vivants, en plein air, s’avançaient d’un pied sûr,
Que les dévots, agenouillés à leur passage,
Les entendaient, le soir, converser sur le mur.

Il est vrai qu’ à la ville on te trouvait sauvage,
Négligent, mal vêtu, toujours l’air d’être ailleurs,
Qu’ on narguait, au Ponte Vecchio, ton gros visage.

Et que les affairés, les oisifs, les railleurs,
Pour qui l’homme pensif n’est qu’ un blessant mystère,
Les filles dont l’amour ne va qu’ aux batailleurs.

Te trouvaient trop distrait pour plaindre ta misère!
Qu’ importe à qui son rêve éclaire les chemins?
La charmeuse par qui tu te laissais distraire,

Distraire des vains bruits et des soucis humains,
La Nature, t’aimait, consolante et divine;
Et tes jours passaient vite à lui baiser les mains.

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Frère, sans le savoir, des grands sculpteurs d’Egine,
En maniant, comme eux, l’outil ferme et loyal,
Tu respiras leur âme en ta mâle poitrine,

Et quand, sur un grabat d’auberge ou d’hôpital,
La Mort qui n’aime pas voir vieillir un prophète,
Te coucha, dans ta fleur, par quelque coup brutal,

La Gloire dut pleurer sur ton œuvre incomplète
Où, comme eux, libre amant de la réalité,
Tu retrouvais pour nous, fier Peintre et doux Poète,

Dans la splendeur du vrai l’éternelle Beauté!